Imaginez les Pieds Nickelés débarquant dans un Londres interlope, sorte de Cour des Miracles de fin de siècle. Au lieu d’être trois, ils seront un de plus. A l’instar de leurs aînés, toujours prêts à fomenter quelque coup juteux, nos quatre compères décident de se cotiser afin de multiplier leur pécule au cours d’une partie de cartes. Une malchance prévisible fera, bien évidemment, capoter l’affaire, leur laissant sur le dos une dette d’un demi million de livres. Et puisque le scénario n’a pas peur de lorgner vers tous les genres, ils n’auront qu’une semaine pour rembourser la somme au caïd de la ville, sous peine de voir disparaître leurs dix petits doigts. En attendant, ils profitent de ces derniers pour se gratter la tête et tenter de trouver une rapide solution à leur problème. Comment donc réunir cette somme dans les huit jours ? A toutes les promesses de cette interrogation, l’intrigue du film répond avec plus de générosité qu’on aurait pu en attendre. Trois intrigues parallèles qui se bousculent pour finir en une, des cadavres qui s’amoncellent avec une indifférence qu’on aurait cru ne pouvoir trouver que chez Hawks, dernière manifestation d’une ironie qu’on ne pensait jamais plus trouver chez la perfide Albion. De cela, et du dédain comique avec lequel tous ces événements se précipitent, aurait pu naître la meilleure comédie anglaise depuis longtemps (toujours ?).
Hélas, il n’en sera rien. Car c’était sans compter sur la patte funeste de notre jeune réalisateur qui, à défaut d’avoir du style, voudrait nous le faire croire. Quand le meilleur traitement qu’on pouvait souhaiter pour ce film était (à l’instar des films des Marx Brothers) une mise en scène transparente, où le comique découle uniquement de l’attention portée aux personnages, à leurs comportements absurdes, notre Guy Ritchie croit bon d’user et d’abuser de lourds effets de styles (grands angles déformants, caméra placée dans les endroits les plus incongrus…). Faire pire que Danny Boyle et son dégoulinant Trainspotting semblait être pourtant une gageure difficile (surhumaine diront même certains). Pas pour le petit Guy en tous cas, qui relève avec brio le défi, et sacrifie du même coup son film à l’autel de la stylistique juvénile. C’est donc sans grande difficulté qu’il arrive à ses fins, faisant d’un scénario qui pouvait prétendre nous réjouir, une œuvre boursouflée et irritante, énième rejeton de films clipesques que l’on nous livre chaque année.
On peut bien hypothéquer sur le talent des acteurs. Laissés au regard abêtissant de notre apprenti sorcier de seconde zone, ils ne sont plus que de bêtes pantins. Mais qu’espérions-nous donc ? Gager sur la malignité de notre homme était évidemment innocent. Et l’effet final d’Arnaques, crimes et botanique est bien celui-là : déceler la part de naïveté de nos attentes, quand nous aurions aimé dire enfin, j’ai vu un bon film britannique.
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