Quand Elephant man rencontre Patrick Bateman… Amusant, ce choix des comédiens principaux de All the little animals : John Hurt en vieil ermite misanthrope et zoophile (au sens premier du terme, on est ici dans une production convenable) et Christian Bale, le yuppie foutraque d’American psycho, en gentil débile, grand sensible, amoureux et défenseur devant l’Eternel de la cause animalière. Bateman a pété les plombs, il est retombé en enfance dans une innocence totale et idéale à laquelle il ne croyait même plus. Elephant man s’est lui réincarné en « Man », tout simplement. Et les deux se sont trouvés : terroristes pour la bonne cause, celle de Dame Nature, ils insultent les automobilistes, enterrent les animaux tués et mangent la bonne soupe comme en l’an quarante.
Gentiment naïf, puis édifiant et consternant, All the little animals ressasse de façon balourde les sempiternels discours philosophiques sur la vie et la mort, l’amour et la haine, le cassoulet et le couscous. La mise en scène de Jeremy Thomas se voudrait soignée et léchée, elle n’est que besogneuse et affectée : pas un seul moment de plaisir cinématographique, pas une once d’émotion, rien ne passe, si ce n’est un petit soupir de lassitude devant une citation faiblarde de La Nuit du chasseur.
L’interprétation de Christian Bale provoque, quant à elle, plus d’exaspération que de lassitude. Le comédien convoque ainsi toute une gestuelle « rainmanesque », à base de gros tics nerveux, de moues rageuses ou exaltées, d’emportements baveux pénibles et peu ragoûtants. On cherche visiblement à nous apitoyer, à nous faire verser notre petite larme… Raté ! On reste sereinement du côté de Daniel Benzali, parfait en ogre tranquillement sadique : c’est lui qu’on veut garder dans le Loft, et pas l’autre benêt atomique. Mais le réalisateur (le public ?) en a décidé autrement, alors…