« Il est de ces livres qu’on se repasse sous le manteau ». Voilà comment Luc Pagès, réalisateur d’A+ Pollux, évoque Le Chameau sauvage (roman dont est tiré le scénario), prix de Flore 1997 alors décerné à son auteur Philippe Jaenada. Drôlatique et surtout d’une légèreté assez étonnante, cette entrée de Jaenada par la petite porte dans la littérature française avait au moins eu le mérite de créer l’alternance contre la littérature trash vite torchée, alors en pleine apparition sur le boulevard St-Germain. Seul problème, en cinq ans, la donne a changé. Et d’autant plus dans le champs du cinéma où, trop souvent, le cinéma français réaliste français aborde, le sourire au lèvre et la larme à l’oeil, nos bon vieux sujets de société (le chômage, l’amour, etc., tout ça avec autant de classe qu’un bon vieux Eric Zonka des familles).
A+ Pollux a ainsi tout de l’objet hybride ; film sans aucune apparente prétention, il est avant tout servi par un fil narratif ténu mais qui tient le choc : comment Halvard (Gad Elmaleh), victime de l’alcoolisme mondain et coureur de jupon malgré lui, arrivera-t-il à retrouver Pollux (Cécile de France, sourire mutin un peu trop factice), l’amour de sa vie rencontrée au hasard d’une pluvieuse ruelle. Le ton, volontairement badin, n’est pas pour autant un gage efficace d’effet comique ; il est ici au contraire le garant d’un certain esprit fleur bleue gentiment romantique qui court pendant la longuette heure et demie du film. La prestation des deux acteurs en rajoute dans ce sens : fragilité ébourrifée de Gad Elmaleh, plutôt convaincant dans un contexte non hystérique (qui a pu supporter plus de dix minutes de La Vérité si je mens 2 ?), beauté éthérée et look total baba-cool de Cécile de France, jolie paumée de service. Tout ça pourrait être presque convaincant si un désagréable sentiment ne perdurait pendant toute la durée du film : celui de voir un produit bien ficelé pour lectrice du Elle en perdition, bobo trentenaire écologiste sans convictions qui cherche une alternative à son Klapisch préféré. Un film mi-saison comme dirait l’autre.