La double embellie d’un cinéma coréen de plus en plus visible chez nous et d’un genre qui ne meurt jamais va sans doute booster ce film de fantômes au-delà de ses mérites. En deçà, 2 soeurs ne se tient déjà pas très bien. L’auteur, Kim Jee-won, nous avait comme déjà prévenu avec 3 histoires de l’au-delà, dont il avait réalisé le segment « Souvenirs » qu’il ne lâcherait rien de son univers clinquant-glauque sans réelle ampleur. 2 soeurs en est la confirmation huilée, qui s’appuie sur un récit traditionnel pour livrer une ghost story virant assez vite à la visite guidée d’un magasin de farces et attrapes. Deux soeurs, donc, sont de retour à la maison familiale, où siègent le papa et la belle-mère, dont l’aînée semble se méfier comme de la peste. Puis débarquent des ectoplasmes menaçants et le film prend son rythme, de scènes de dispute entre la marâtre et l’aînée, de violence et d’humiliation de la cadette, sous les yeux du père, très vite dépassé par les événements. Et tout le cortège de clichés et de scènes téléphonées qu’un tel sujet ne manque pas de réclamer : hystérie, univers étouffant et démasculinisé, tiroirs secrets, mutations adolescentes, apparitions hautement symbolique du flux menstruel, petit Titi zigouillé dans sa cage, prise en charge symbolique des troubles de chacun par des décors malades filmés jusqu’à plus soif, etc. Tout cela déroule, jusqu’à l’aberrant twist final, avant lequel les fantômes planqués dans les armoires, sous les placards, un peu partout, auront surgi comme des diables de leur boîte, selon une cadence quasi militaire.
Ici le programme du genre (ficher la trouille avec des revenants pas contents qui entrent dans les pièces et les rêves sans jamais prévenir, les malotrus) est si grossièrement respecté qu’il se passe entièrement de profondeur. Ça débarque de partout, on ne sait pas trop pour quoi, ça s’en va et ça revient. Super, le scénar. Ces apparitions saupoudrent le film comme des petites confiseries bêtement surfilmées, comme pour bien signaler leurs hautes qualités esthétiques et flippiques. Un tel fatras grassouillet ennuie plus qu’autre chose. Et d’un oeil las, contempler ce morne jeu de massacre, et d’un oeil fataliste, se dire qu’une pareille arnaque a plus de chances de rencontrer le public que, par exemple, Séance de Kiyoshi Kurosawa, dont la modestie et la puissance, le moindre bruissement, en valent toutes les minutes.