En préfaçant Ascension, Schuiten rend un bel hommage à cette dessinatrice de BD poétique et talentueuse qu’est Séraphine. Tout en délicatesse, elle nous replonge dans l’univers de l’enfance, dans ces rêves fous et extravagants qui nous accompagnent toute notre vie d’adulte. Son univers à la Vialatte, ce mélange de douceur et de violence à la Batling le ténébreux, est mis en image, sans maniérisme et sans angélisme outrés.
Ascension est une jeune enfant à l’imagination débordante et fugueuse, qui rêve un jour de faire voler son meilleur ami, le cochon de la ferme. Dans une petite cabane, au milieu de la forêt, elle collecte des plumes, construit des ailes géantes et travaille patiemment à son invention. Le rêve est à la dimension de son imagination débordante, de sa soif de bonheur et d’évasion. Elle veut se lancer sur les routes, partir sur ce chemin « qui va nulle part ». Elle s’accroche à cette idée, elle reçoit les réflexions cinglantes de sa mère comme un défi à relever. Le prince charmant se détache sur les collines, Ascension voudrait le suivre pour ne plus jamais revenir. Elle étouffe dans cette ferme au lourd passé. Celle-là même, où un matin de brume, son père s’en est allé.
Les planches sont belles, évidentes de par leur simplicité. On peut juste regretter que la vie intérieure de cette petite fille ne soit pas retranscrite plus pleinement. Sans doute, Séraphine veut-elle préserver le mystère et nous laisser libre d’imaginer le reste. Une très belle histoire néanmoins, dans laquelle on peut reconnaître toutes sortes de fantasmes personnels.