Allez savoir pourquoi, le premier Banlieue 13 ne nous avait pas laissé un si mauvais souvenir. Confit dans la mélasse putassière du système Besson, le film s’en dégageait parfois, comme par miracle, le temps d’un découpage altier ou d’une approche strictement ludique, presque foraine, de l’action. Une sympathie qui découlait surtout de son ADN nanardeux. Ce code-source refoulé mais bien ancré dans ses fondements accouchait d’une irrésistible dynamique où l’élégance féline des fights le disputait à une sociologie de CE2. Film de beauf friqué, Banlieue 13 c’est un peu le gros lourd qui se tient bien pour draguer une fille, mais rote en l’embrassant. En bonne suite, Ultimatum se contente du renvoi. A la barre, Patrick Alessandrin (15 Août et Mauvais esprit, quand même) capitule d’entrée de jeu et se laisse prendre aux rets des gribouillages analphabètes qu’on lui sert en guise de script. Première scène ? Cyril Rafaelli, le clone officiel et prépubère de Jason Statham, se grime en poufiasse et nous impose sa raie du cul plein cadre pour infiltrer la mafia. A côté, les cagols incontinentes du Transporteur, c’est du Pasolini.
On en rirait si tout cela ne se prenait pas tant au sérieux. Si Besson nous épargnait sa maïeutique de bistrot et se contentait de racoler avec du sang et quelques nichons (le minimum quand on fait du cinoche d’exploitation). Mais non, il lui faut sa petite quête de sens, son laïus démago et sur la banlieue, et sur la République, et sur la différence, asséné, comme d’habitude, avec l’acuité d’un mammouth presbyte et une syntaxe des grands soirs (« Cette solution n’est pas la meilleure, M. le Président, mais c’est la moins pire », sic). Et rien dans la mise en scène ne vient lâcher du lest : au lieu de détourner l’attention des débats, Alessandrin se laisse aller à une complicité coupable, souligne, surligne, bégaie ses enjeux jusqu’à l’absurde. Combien de replays ouatés nous mâcheront le travail d’assemblage – niveau Lego pour 3-6 ans – pour s’assurer que tout le monde a bien compris ? Sûr ? Même les trois teubés du fond ? L’agacement prend vite le pas sur toute autre considération. Jusqu’aux coups de tatane, au demeurant parfaitement exécutés, qui se suivent l’œil mollasson et la quéquette en berne : depuis qu’il les a signés en CDI, le studio Europa case ses Yamakasis partout (Les Rivières Pourpres 2, Taxi 2 et consorts), leur commande cabrioles et sauts dans le vide, mais dans une logique de démo cinématographiquement contre-productive (un corps n’imprime rien si l’espace n’y oppose aucune résistance). Que reste-t-il alors ? Des acteurs à la bouche anesthésiée, quelques vannes au radar et surtout Philippe Torreton, inénarrable de sérieux en président dépassé, dont on ne sait s’il est là pour payer ses traites ou à cause d’un pari malheureux. De quoi patienter, le fou rire aux lèvres, jusqu’à la fin de l’ulimatum.