ATTENTION SPOILER : ultra-malin, ce dernier-né d’Ozon, qui déroule ici sa petite fable en zigzags permanents. Un couple de prolétaires enfante d’un bébé ailé, c’est le pitch, l’idée première, et Ozon embraye tout de suite en furetant dans tous les sens, au culot : ici une grosse ellipse pour démarrer, là une saillie à la baby-Cronenberg avec nourrisson paré d’ailes de poulet, Alexandra Lamy en tête d’affiche, on en passe et des meilleurs. Le film fait son miel de ces fractures, changeant d’humeur quand ça lui chante, piochant juste ce qui lui faut, toujours à la limite de l’imposture. L’ensemble pourrait s’avérer éreintant, mais non, Ozon donne toujours à séduire sans forcer son talent, sûr de son dispositif et de ses atouts. Car les bouleversements taillés à la serpe ne cisaillent aucunement les lignes d’horizons du film (exclusivité narcissique de la mère à l’enfant, déploiement du fantastique au détriment du décorum loachien), qui au contraire s’affirment et s’éclaircissent tout du long.
La grande force de Ricky tient surtout au fait qu’il gagne en densité sans se lester de grandiloquence, fidèle à son credo de micro-film dopé au confinement et à la miniaturisation. De la baby star au décor – une usine, une chambre d’enfant, un clic-clac – tout est maîtrisable, tracé en un plan ou deux. En résulte une légèreté vivifiante, un surplus de contrôle qui transforme chaque tour de force en numéros gracieux et dégraissés. Pour preuve, l’envolée du bébé au milieu de la cour HLM, lyrisme troussé d’un coup de violon et de discrets mouvements d’appareil. Du rarement vu dans l’univers ankylosé du cinéma français.