Construit sur une succession ininterrompue de situations morbides et stressantes, la série Siren ne montre, dès ses débuts, aucun signe de compassion pour le joueur. Pas une respiration entre deux missions de fuite de son village de fou furieux ; à peine une cut-scene pour récompense d’avoir éviter la mort à tel ou tel protagoniste.
Dans Siren, la satisfaction d’avoir sauvé son personnage est un plaisir modeste et bref, hors champs, et toujours bousculé par une nouvelle mise en situation plus terrifiante que la précédente. Ce nouvel opus, faux remake du premier (seule l’histoire s’en rapproche), et toujours orchestré par Keiichiro Toyama, demeure fidèle à cet éprouvant sens du rythme. Pourtant, le grand frère intello-punk du survival horror a pris une douche et de bonnes résolutions. Si Forbidden siren 2 se voulait plus indulgent, Siren : Blood curse n’hésite plus à remettre en question certains de ses fondamentaux. Exit le scénario nébuleux déployé sur un tableur abscons : Blood curse se découpe désormais en épisodes individuels accompagnés, à la manière de la série TV Lost, de son résumé prologue et de son « coming soon » en cliffhanger. Un procédé certes artificiel mais qui facilite la mue de la série vers une narration plus linéaire et, surtout, offre quelques minutes de recul salvatrices au joueur sous tension. Deuxième lifting : le sight-jacking (cette capacité à voir par les yeux d’un ennemi) a été grandement améliorée. Le joueur peut désormais combiner, tout en progressant, sa propre vue et celle du shibito.
De fait, voir en direct le faisceau de sa lampe traverser le champ de vision d’un shibito constitue non seulement la nouvelle moelle épinière de la frayeur sirenienne, mais aussi un test en temps réel de la personnalité du shibito en question et de sa réactivité. Parce qu’enfin, c’est aussi la nature de ce zombie plouc japonais que Siren se propose de préciser. Plus humains et plus flippants, les shibitos apparaissent soudain comme des enfants homicides qui se rêvent adultes. Et Siren : Blood curse de signer définitivement, à l’aide de quelques compromis bienvenus, l’arrivée à maturité de son épatant concept tout en conservant son postulat essentiel. A Hanuda, plus que dans les romans de Coupland, toutes les familles sont psychotiques.