Paradigme du cinoche formica, Faubourg 36 se renifle dès les premiers flonflons comme un shoot ultime de naphtaline. L’époque fantasmée (le Front Populaire), l’esthétique en carton (nouvelle qualité française), les acteurs du cru (Jugnot, Cornillac, Kad, Morel), le bal costumé (postiche, marcel ou béret ?), les ritournelles (Yvette Horner aux platines), tout participe de cette impression de point-limite du genre et nous plonge dans les tréfonds d’un Paris d’Epinal maquillée en pub pour assurances. La moustache en bandoulière, l’ami Jugnot y joue un machiniste de music-hall qui perd son gosse en même temps que son boulot. Alors qu’en arrière-plan les luttes sociales font rage, lui et ses potes (un syndicaliste et un comique raté) vont se retrousser les manches et regagner leur honneur perdu en montant un nouveau show.
Il y a quelque chose de fascinant dans cet objet rance et passéiste, une politique de la boule à neige qui cloisonne autant qu’elle enjolive. Faubourg 36, c’est du cinéma claquemuré, centripète, sans autre horizon que celui de l’enluminure et du fac similé. Enjeux sociaux et arcanes du spectacle y passent à la moulinette du rétroviseur et en ressortent évidés, curetés comme une coquille de noix. En se retranchant derrière Delannoy et Carné, Barratier n’arrange rien. Son travail transpire la sincérité mais se contente de plaquer, décalquer l’antan d’un geste mécanique sans jamais lui insuffler la moindre poésie ni vitalité. Même Jugnot & co sont comme ravalés au rang de mannequins sans âme, réduits à l’état de vignettes édifiantes et vermoulues. Après Les Choristes, le cinéaste persiste à ne retenir du passé que poussière et formol. Ses défenseurs argueront sans doute d’une production chiadée, de mouvements d’appareils spectaculaires, de sa jeune révélation (l’atomique Nora Harzeneder). Mais ce luxe apparent ne joue qu’un seul rôle : celui du linceul.