Le cerveau d’un jeune journaliste est une drôle de petite chose qui ne connaît pas grand chose à la musique, et se montre en conséquence très sensible au buzz. Pour preuve, il ne lui faut pas beaucoup plus que deux-trois références fumeuses (The Sleepy Jackson, Mew, Dave Fridmann), un titre qu’aurait pu pondre Mercury Rev et une comparaison à l’héroïsme de Muse chez Pitchfork pour qu’il manque d’avaler sa salive, se bouche les oreilles sur un concert de louanges (Auréliano Tonet de Chronic’art – Chronic’art #44) et Hianta des Fluokids sont tous deux allés de leur compliment) et prenne la fuite. Un mois plus tard, tout le monde a déjà écouté, tout le monde écoute encore, « mais POURQUOI ? » s’interroge le gamin toujours en retard (ne rigolez pas, ça me le fait tout le temps). Il écoute Time to pretend, et entend Marc Bolan susurrer avec la plastique pupute des Raveonettes tous ses rêves de rock star. Claque, MGMT vient d’entrer dans sa vie.
En même temps, c’était pas bien difficile, cette dernière ne ressemble à pas grand chose (« Get jobs and offices and wake up for the morning commute »), lui aussi rêve de Paris, d’héroïne et de mannequins pour femmes – sinon pourquoi écrire sur la musique – et les VanWyngarden et Goldwasser ne lésinent pas sur les clins d’oeil à son ennui, sa liberté ou le temps passé tout seul. Et puis il y a le souffle avec lequel tout ceci est projeté : quoiqu’en disent les plus sceptiques sur ses plumes et paillettes glam, il est pure lévitation quand il compresse les lignes de synthés jusqu’à saturation, déploie les lasers, les choeurs et les cordes alors que les mêmes matières étouffent chez Arcade Fire ou Flaming Lips.
Le lendemain, le garçon part à la plage avec Oracular spectacular pour digérer la nuit passée à écouter ce seul Time to pretend, sans possible repos toutefois alors qu’un défilé d’icônes paradent dans le sable. Ziggy Stardust en maillot de bain lui chante sa guerre du week-end à travers un tuba, sur des entrelacs de guitares, carillons et glockenspiel (Weekend wars), Todd Rundgren étage les harmonies vocales léthargiques (The Youth), Kevin Barnes déchaîne un funk en mode falsetto tout sourire après colossale ingestion d’antidépresseurs (Electric feel) et les Kids dans la flotte hurlent du mieux qu’ils peuvent un nouvel hymne de stade. La suite voudrait l’entraîner dans une quatrième dimension avec des surfs volant sous des ciels psychédéliques, il crie « oui » avec la foule, la vérité c’est que la pilule peine à prendre effet avec les ersatz de Nada Surf (Of Moons, birds & monsters) et The Verve (The Handshake) alors que secrètement il fantasmait sur un trip Loop ou Spacemen 3. Piètre came, mais bon le plagiste veut bien refaire la même chose toute la semaine et il a eu sa réponse au « POURQUOI ? ». Bah oui, il n’est pas tout seul, et son époque a très certainement autant besoin de MGMT que lui, même si elle en a déjà tout entendu. D’ailleurs moi aussi, je l’ai trop écouté ce disque.