Harold Crick, agent du fisc tatillon, découvre que sa vie déprimante est téléguidée par l’inspiration d’un écrivain à succès. Il s’affole quand il entend une voix narrer sa mort prochaine. Conseillé par un théoricien littéraire, il entreprend de devenir un personnage de comédie pour échapper à son funeste destin. C’est la règle, les rigolos ne meurent jamais.
Postulat alambiqué mais malin, dont le principe n’est pas sans rappeler Un Jour sans fin. Reste que le film de Marc Forster n’arrive pas à la cheville du joyau d’Harold Ramis, modèle de comédie horlogère pétillante d’intelligence. Non qu’il soit ouvertement raté, mais il n’a aucun sens de l’humour, ce qui est ballot pour une comédie. La faute à Forster, sinistre machino grand luxe à Hollywood, bizarrement porté au pinacle pour l’abominable A l’ombre de la haine et jamais redescendu depuis. Neverland et Stay étaient pourtant archi-nuls, enrobés dans un académisme auto satisfait mais pas jouisseur une seconde. La dernière livraison ne dépareille pas. Impossible de savoir ce qui anime le cinéaste. Pas ses acteurs en tout cas : Will Ferrell joue contre-nature, comme bâillonné ou honteux de sa dinguerie. De toute façon, la comédie n’a pas le temps de s’installer. Elle ne fait qu’effleurer le film au détour d’une image (généralement un effet spécial), ou plutôt dans un coin du scénario.
Seule l’écriture est alors dévolue à mener la danse. On retiendra deux scènes. Les retrouvailles d’Harold Crick avec une cliente (Maggie Gyllenhaal) sur qui il a flashé dans la jointure d’un bus accordéon. Gêne profonde du type qui meuble en se dandinant au gré des virages, au bord de la nausée : le burlesque bat son plein et les acteurs prennent leur pied. Idem lorsque Harold, reclus dans son appartement, stoppe toute activité afin de refreiner l’inéluctable. Séquences efficaces car le film joue enfin la carte du ludique, il fait corps avec son personnage et l’intrigue. Hélas, le reste du temps, tout n’est qu’assemblage poussif. Au moindre coup de fatigue du scénario, Forster se calle en position gravité : Ferrell fait la gueule, attendant son heure comme un acteur Shakespearien au rabais. Dès lors, impossible même pour les initiés, de déceler le génie du créateur de Présentateur vedette : la légende de Ron Burgundy. Et dire que Ricky Bobby roi du circuit n’est toujours pas programmé pour une sortie dans les salles françaises…