Atterris on ne sait trop comment sur nos écrans, Les Sentiers du petit bonheur sont réservés à un public bien particulier, celui des amoureux de la Savoie. Sorte de commande régionale, le film d’Anne et Erik Lapied a monopolisé pendant une année les habitants du petit village de Marthod. A la fois acteurs et techniciens, ces derniers se sont impliqués corps et âme dans ce tournage artisanal aux objectifs honorables. Il s’agissait avant tout de conserver une trace de l’activité rurale, tant d’un point de vue contemporain qu’historique, d’où le partage du film en deux parties bien distinctes mais alternées par le biais du montage.
En premier lieu, la reconstitution en noir et blanc de la vie du village en 1910, travail rendu possible par la mémoire des patriarches et les documents d’archives (la plupart du temps, des photos de famille retrouvées). Afin de donner plus d’authenticité à ces séquences, les auteurs y ont greffé un embryon fictionnel sans grand intérêt, une histoire de cœur permettant d’évoquer les usages de l’époque (mariages arrangés, misère des paysans pour lesquels même la dot posait un véritable problème financier, désirs de rompre avec cette existence provinciale). La romance du Pierre et de la Rosine -avec l’accent, les vaches, les fourrages et surtout les plus mauvais comédiens amateurs du monde- est parfois suspendue par des intermèdes en couleur, cette fois purement documentaires, qui font se succéder enquêtes sur la persistance des traditions (que ce soit dans le cadre de l’enseignement ou du théâtre) et images du tournage. C’est d’ailleurs dans ces séquences de making-of que le film trouve ses plus jolis moments, au cœur de l’harmonie festive dont l’ensemble des villageois paraît avoir fait preuve. Comme dit en substance l’un des habitants de Marthod, « cela donne l’impression de se retrouver à une grande réunion de famille ». Pas forcément la nôtre (ah ! cette passion immodérée du folklore…), mais il en faut pour tous les goûts.