C’est désormais un fait : le 11-Septembre a profondément modifié le blockbuster américain. Au-delà d’un retour doublé de la paranoïa dans le cinéma grand public US pas vu depuis les grandes heures de la guerre froide et du huis clos aérien (Red eye il y a quinze jours, Flight plan aujourd’hui, et de Flight 93 à Snakes on a plane, une demie-douzaine de films au postulat similaire prévus pour 2006), c’est surtout une nouvelle vision de l’héroïsme qui se dessine. Petit flashback. Dans les années 90, les suspenses en plein vol étaient réservés aux gros bras de tous âges : Wesley Snipes, Steven Seagal, Kurt Russel, Bruce Willis, jusqu’ à faire d’Harrison Ford un président américain réglant le sort de pirates de l’air dans le nanardesque Air force one. L’heure du machisme est révolue : aujourd’hui ce sont les femmes qui prennent les affaires en main. Par exemple, Jodie Foster en jeune veuve rapatriant, avec sa fille, le corps de son mari. Maman s’endort quand elle se réveille, fifille a disparu mais personne n’a souvenir de sa montée à bord.
Pour apprécier Flight plan, il vaut mieux faire le même parcours que l’héroïne, mais à rebours : dormir les dernières trente minutes, les scénaristes ayant planqué dans la soute d’un plaisant thriller hitchcockien une théorie du complot des plus grotesques, évacuant par les toilettes de l’avion l’efficace climat anxiogène qui prônait jusque là. La mise en scène Schwentke, dans un premier temps, pépère en pilote automatique lisant le manuel de bord du David Fincher pour les Nuls ne prendra plus jamais le dessus sur ces éprouvants trous d’air. Seule maîtresse à bord, Jodie Foster, qui trouve avec ce film une sorte d’extension à ces derniers rôles, cette mère courage qui se rattache d’évidence à celle qu’elle a jouée dans Panic room ou même Le Petit homme et Week-end en famille, ses deux films de réalisatrice qui esquissaient des cellules familiales fracturées. L’actrice, dans un rôle écrit à l’origine pour un homme, est la seule issue de secours de Flight plan tant elle s’efforce de rester crédible en mère au bord de la crise de nerfs. Etat probable en fin de séance des spectateurs qui auront subi de façon subliminale, à force de matraquage, la bande-annonce du film : deux plans révèlent sans vergogne le redoutablement idiot twist du film.