Si Ralph était un club de foot, il jouerait en D2. Mais en tête, ou alors en D1, pas loin du reléguable, avec le maintien en seule ligne de mire, plus un ou deux exploits en coupe. Question de budget, de notoriété aussi, le film de Michael McGowan, ne dispose pas d’un effectif lui permettant de jouer les premiers rôles. Ceci étant, le technicien a misé sur quelques vieux routiers pas trop chers encore bons pour le service. Campbell Scott, sorte de Nicolas Ouedec des surfaces Hollywoodiennes qui ramasse ce que Tom Hanks ne veut pas, et l’injustement tricarde Jennifer Tilly, actrice magistrale (Bound, la Fiancée de Chucky) qui prend tout, du moment qu’elle tourne. Coté tactique, un bon 4-4-2 fera l’affaire : cadre rétro-années 50 à l’arrière, le sport-mélo en solide milieu et l’enfance difficile en pointe, l’attelage a déjà fait ses preuves.
D’autant que Ralph déroule son savoir-faire avec une belle application scolaire. Il y a bien ça et là, quelques traces de prétentions en formes de poses chichiteuses (le chapitrage du film par divers Saints, quelques références au surhomme de Nietzsche) rappelant les sursauts d’orgueil de Michael McGowan qui croit sûrement dynamiter le genre de l’intérieur, mais l’ensemble reste gentiment ramassé, en bonne mécanique professionnelle de cinéma familial. Le degré de ronronnement est tel qu’il condamne le film à une indifférence programmée proche de l’absurde. Pas une boursouflure formelle, pas un risque ni même une dégénérescence, rien, le néant on vous dit. Néant qui porte Ralph au seul rang d’accident industriel causé par excès de perfection. D’où une sorte de coolitude morte, entre Halloween de la convention et système englouti par sa propre production.
McGowan va même jusqu’à théoriser cette ode au cahier des charges, l’action découlant de formules de livres de recettes, d’évangiles quelconques ou de phrases prises au pied de la lettre. Tel est le postulat de Ralph, jeune surdoué désaxé qui s’entraîne à courir le marathon de Boston pour sortir sa mère du coma, après qu’un prêtre lui ait dit que seul un miracle peut la sauver. Dès lors, le film ne cherche qu’un alignement consensuel, abandonnant la chronique andersonienne du génie soliste esquissée au départ. Ralph s’intègre peu à peu à la masse ou la masse le recouvre : ses grossiers camarades l’applaudissent après lui avoir lancé des tomates, tout comme ses profs réfractaires. Dans le même temps, McGowan accepte son statut de chef de produit de ventre mou, mi-hollywoodien, mi-indépendant. Preuve flagrante : l’ado termine deuxième et sauve sa mère. Champion de D2, assurément.