Margo, duo à géométrie variable (pas mal d’intervenants), existe depuis 1999, s’est fait connaître avec un premier LP, The Catnap, et un album de remixes. Le groupe a forgé sa réputation singulière sur la foi de quelques concerts, où fusionnait une electropop légère et diverses autres activités artistiques : images vidéos projetées, graphisme à tous les étages, vêtements créés pour l’occasion par la chanteuse du groupe, le tout permettant la création d’une entité englobante, hybride, pluridisciplinaire, ambitieuse. Musicalement, le groupe distille une pop électronique poétique, un peu froide, parfois atmosphérique. Les lignes de basse évoquent Peter Hook, un minimalisme récurrent rappelle les Young Marble Giants, les petites guitares sont post-rock, le sound-design n’a rien à envier aux électroniciens laptopers confirmés (plus Mira Calix que Dorine Muraille), et de petits synthés rappellent le Rectangle de Jacno, autant que la voix sucrée de la chanteuse évoque son égérie Lio.
Cette electro intimiste se pare d’atours volontiers plus voyants, sur le morceau titre par exemple, où les beats se font techno et où la voix se vocoderise, entre Kylie Minogue auto-tunée et basslines Fischerspooner en plus cheap, le refrain étant une ritournelle haletée. Ou sur la plage 4, avec son beat house, sa petite guitare new-wave et son compte à rebours à la Annie. Mais l’ordinaire de Margo se veut plutôt léger, insouciant, printanier, perclus de petites textures électroniciennes discrètes. Mélodies pop sur textes abscons et soufflés, à la limite de l’inaudible dans leurs maniérismes, le disque ennuie parfois, séduit par endroits, laisse un peu sur une faim de renouveau pop, qu’on aurait bien vu pris en charge par ces programmateurs avertis. Pas assez opportunistes, trop consensuels, trop compliqués, trop naïfs, on ne sait ce qui manque à Margo pour que la mayonnaise prenne.
Restent de beaux restes, qui se logent dans les interstices, les ponts, les amorces, les intros, des instrumentaux, où s’égrène une mélancolie fugace, faite de sound-design gracieux et de temps pris sur le temps. Le reste est moins inattendu, comme les fesses entre deux chaises : une certaine joie à expérimenter et l’envie d’en découdre avec la pop la plus populaire. L’écoute se fait entre ces deux rives, triant le bon grain de sel d’une mécanique encore en rodage. On attend les live donc, et leur désir de totalité, pour se laisser emporter.