Il n’y a peut-être rien de pire au cinéma que d’avoir l’impression d’être dans son salon et de visionner un téléfilm du mercredi soir sur France 2. C’est une des sensations que laisse le dernier film de Francis Girod qui souhaiterait que l’on voit dans son film un message dérangeant et audacieux.
Dans une classe de terminale d’un lycée parisien, une élève se suicide en se précipitant dans le vide, pendant un cours de philosophie. Ses camarades apprennent que quelques jours auparavant, elle avait eu une liaison avec le professeur de philosophie (Bruno Wolkowitch), tout à la fois séduisant, violent et érudit. Les six élèves mènent l’enquête ; ils découvrent outre son attitude ignoble à l’égard de la lycéenne, qu’il écrit des articles et ouvrages négationnistes et racistes. Ils décident de le supprimer physiquement…
Dix ans après L’Enfance de l’art, Francis Girod s’attache à dépeindre une partie de l’adolescence : des élèves comédiens en 1988, des lycéens confrontés à un grave problème aujourd’hui. On retrouve sensiblement les mêmes défauts dans les deux films : des personnages sans épaisseur et caricaturaux, un manque de finesse dans le discours défendu et surtout une mise en scène boursoufflée. Une séquence illustre particulièrement cette dernière remarque : les élèves s’allongeant les uns après les autres dans la cour du lycée sur les empreintes de corps, peintes pour rappeler la mort de leur camarade la veille. Le film souffre d’un aspect démonstratif trop appuyé et pose le problème de la représentation de l’extrême droite à l’écran. Rémi Terrien, l’enseignant de philosophie, nous est décrit comme une espèce d’ordure, charismatique, cynique qui cite Drieu La Rochelle en cours et écrit dans une revue tirée à 666 exemplaires… Or nous savons que le Front National regroupe des gens bien plus inquiétants : d’apparence sympathiques, bons pères de famille, amoureux des arts… Terrien se révèle rapidement dans le film abject et la mort qui vient le frapper à la fin du film, n’émouvra aucun des spectateurs.
Francis Girod et son scénariste Gérard Miller ont voulu poser des questions graves : quelle attitude adopter face à l’extrême droite ? Comment réagirait un groupe de jeunes face à un enseignant négationniste ? La violence serait-elle la seule solution ? Malheureusement, ces interrogations auraient mérité plus de nuances, moins d’incohérences et surtout, du ci-né-ma, absent du film, ce qui est plus grave. Francis Girod a baptisé le lycée « Jacques Becker », voulant ainsi se placer dans la lignée du réalisateur, notamment de Rendez-vous de Juillet (1949), qui en son temps avait réussi à peindre une chronique d’une génération, avec une justesse du traitement, de la mise en scène et un dynamisme qui manquent cruellement à Terminale. Espérons tout de même que ce film ne passera pas tout à fait inaperçu et qu’il soit le point de départ de débats autour des thèmes qu’il aborde.