Hyper attendu au tournant, Starsky & Hutch assure en s’autoproclamant culte. Avant même l’existence du film, la promo nous invite à replonger dans son univers à grands coups d’affects nostalgiques, d’affiches Rouge-Blanc-Crème, de Ford Gran Torino et de ritournelles inoxydables en-veux-tu en-voilà. Fan parmi les fans, Todd Philipps signe un opus en totale adéquation avec la série, bien sûr, mais aussi avec les seventies, la fan-attitude et l’un des duos comiques les plus stimulants du moment, Bill Stiller-Owen Wilson.
Certes fan et nostalgique, Philips n’en reste pas moins progressiste. Tout son cinéma (de Road Trip à Retour à la fac) est travaillé par un jusqu’au-boutisme pince-sans-rire, lame de fond qui trame ses films vers une lucidité parfaite. Et ce qu’il y a justement de plus spectaculaire dans Starsky & Hutch, c’est son austérité étonnante pour un blockbuster a priori voué à l’hystérie. Un refus d’exploser qui se retrouve dans le design fétichiste, réplique carbone de la série qui, dégraissé des artifices new age, porte un regard sûr et serein sur la mythologie qu’évoque le film. Ré-investi par Stiller-Wilson, ce musée des seventies se change en terrain de déconne : on se glisse dans les sapes de la Fièvre du samedi soir, on chevauche les bécanes d’Easy rider. Le cinéma-karaoké fonctionne à plein régime, rarement aussi ouvertement théorisé.
Car Philipps enregistre ces confrontations avec une précision chirurgicale. La potacherie face au mythe, Stiller face à Starsky, Wilson face à Hutch, le cinéaste érige tout cela en décalage constant, structure imparable mais risquée pour une comédie. Pourtant, ça marche : l’étirement de gag n’est jamais laborieux puisque disséqué, attentif et en surface ultra-sérieux. L’irrévérence jouissive du tandem se double constamment d’un regard critique du cinéaste, qui épaissit chaque élément (acteurs, personnages, époque) avec une virtuosité certaine. Après Wes Anderson, Ben-Starsky et Owen-Hutch adoubent magnifiquement l’imperturbable Todd Philips.