Heureux hasard : deux ténors de l’infiltration se sont donnés le mot pour sortir un de leurs avatars quasiment en même temps… Metal gear solid : The Twin snakes vs. Splinter cell : Pandora tomorrow, la tentation de les comparer est irrésistible. Mais The Twin snakes n’étant qu’un remake gonflé aux stéroïdes du premier Metal gear, il s’exclut de lui-même de l’inévitable affrontement. Il serait plus logique de décortiquer Pandora tomorrow à l’aune du prochain MGS : Snake eater, d’autant que, seconde coïncidence (?), les deux jeux plongent leurs héros respectifs au plus profond d’une jungle luxuriante propice aux cache-cache les plus stressants. Mieux (et plus honnête), il faudrait comparer le deuxième Splinter avec MGS2, l’ogre-sequel gobant goulûment l’épisode précédent pour mieux le dégueuler baignant dans une improbable soupe auto-réflexive et hyper-mélo-parano. Pandora tomorrow n’est rien de tout ça, évidemment. Logique : Splinter cell n’est pas une oeuvre d’auteur mégalo, c’est une oeuvre de bons faiseurs, presque interchangeables -ce second opus a d’ailleurs été sous-traité par Ubisoft Shangaï. Pandora tomorrow est donc une simple extension du premier opus, reprenant les choses là où elles s’étaient arrêtées… Mini-tutorial évacué lors des premières minutes de jeu comme une piqûre de rappel, hausse vertigineuse de la difficulté dès la deuxième mission : tout a été pensé pour ceux qui se sont déjà essayés au premier épisode.
La démarche est un peu paresseuse, les nouveautés se font rares, mais en tant qu’extension, Pandora tomorrow remplit ses obligations. Il dépoussière le Splinter original, le sublime parfois, lorsqu’il plonge le héros Sam Fischer au beau milieu d’une jungle indonésienne, une ville orientale plombée par une pluie torrentielle ou dans un train filant à grande vitesse. Evidemment, il n’échappe pas à la redite -la majorité des phases d’infiltration en intérieur-, voire aux baisses de rythmes. Et il ne corrige pas les défauts les plus marquants de la série : ce petit manque de panache, cette recherche compulsive d’un réalisme castrateur. Vieilli, un peu las, parfois caustique, Sam Fischer n’est finalement qu’un toutou obéissant aux sacro-saintes règles de la crédibilité, et aux injonctions de son patron, l’avatar masqué des développeurs du jeu, qui lui indique où aller pisser. Aussi psychorigide que jouissif, Splinter cell ne s’apprécie que si l’on accepte ses préceptes, sa progression dirigiste et son gameplay fermé. Plus abouti mais moins consistant parce que plus court que l’épisode précédent, Pandora tomorrow affirme la puissance ludique de Splinter, cette indubitable séduction du stealth-game, presque auto-érotique -il faut presque caresser le stick analogique pour ne pas faire trop de bruit en se déplaçant-, là où il fallait le pousser encore plus loin, dépasser le stade de l’add-on. Surtout sur une console qui proposait, il y a peu, des missions bonus pour le premier opus sur le Xbox Live.
Décevant ce Pandora tomorrow ? Un peu. Mais il suffit de jeter un bref coup d’oeil au mode online implémenté pour comprendre que ce deuxième épisode solo n’est qu’un prétexte pour vendre un autre jeu, en réseau cette fois-ci, qui réinvente Counter strike en mixant deux types de gameplay : infiltration d’un côté, FPS de l’autre, espions contre mercenaires dans une partie de cache-cache absolument fascinante. Du coup, on comprend mieux le sous-titre un rien pompeux du jeu : Ubisoft vient effectivement d’ouvrir la Boîte de Pandore de ce que sera le jeu vidéo de demain, une gigantesque partouze de genres « réseausphérique » pour gamers du monde entier.