Difficile de trouver machine hollywoodienne plus parfaite. Au moins cette suite de Mon Beau-père et moi mettra tout le monde d’accord. De la conception au casting, c’est du travail de pro. Un peu comme Shrek 2, autre imperturbable carton Dreamworks, ce produit est tellement programmé pour gagner qu’il en perd sa condition de film. Pas de sujet propre (c’est une suite), pas de personnage, ni même de mise en scène, Mon beau-père 2 est un simple désossement de l’original. On sépare tous les éléments (allez, au mieux on les étire) qu’on aligne comme une collection de bibelots. Résultat, c’est automatique, on rigole au moins plus d’une fois, suffisamment pour ne pas en dire du mal et laisser les bandes annonces, le casting et les affiches en dire -par définition- du bien.
Pour l’intrigue, il faut simplement lire le titre. Français ou anglais, on comprend tout pareil. Mieux que ça : si vous êtes bilingue, les versions s’emboîtent. Mon beau-père (la belle-mère, on s’en fout, elle est moins connue que De Niro) meets the Fockers, c’est à dire rencontre mes parents (Dustin Hoffman et Barbra Streisand, deux stars, d’où « mes parents » et non « mon père »). Et « moi », c’est toujours Ben Stiller, qui ne semble là que pour la quadrature du cercle. Gaffeur génial, martyr hilarant dans le premier, il est ici un peu tricard en gags, réduit à se faire le porteur d’eau de ses glorieux aînés. Même son fond de commerce, yeux écarquillés et fameux « What ? » inquiets, est partagé en deux acteurs.
Un peu triste, mais bon, Dustin Hoffman sauve les meubles en baba déjanté et nympho. C’est lui le grand gagnant de l’affaire : personnage tout neuf, dont l’excès farrelien donne à l’acteur un souffle nouveau et réjouissant. Maman sexologue portée sur les massages, Barbra Streisand a bien quelques bonnes scènes mais moins de chance. Elle n’est qu’un corps dévidé de mythologie, une vignette people dont le film ne sait que faire. D’ailleurs le film ne sait jamais vraiment quoi faire. D’habitude si cool pour tenir les festivals d’acteurs et inspecter tous les recoins du plateau (la série des Austin Powers, c’était quand même autre chose), Jay Roach zappe à tout va, pond des scènes à cadence métronomique. Complètement informe, le film déborde de tous les côtés, à des années lumières de l’hilarante ligne droite du premier. Le cinéaste ne répond plus, mais Dreamworks s’en tamponne. Sans lui, la machine marche quand même.