Petit thriller ringard et fauché, Une Employée modèle tente de réactiver sur un mode franchouillard et dans l’ambiance chaude d’une PME normande les grands modèles du film noir classique américain : une femme fatale, un bon bougre victime d’une manipulation, des personnages inquiétants traversant le film pour de brefs accès de violence, un flic pépère mais efficace. Tout, dans le film de Jacques Otmezguine, sent les soldes, de la mise en scène miteuse par moments, flasque le reste du temps, aux personnages sans envergure en passant par un sous-texte naïf donnant une fade couleur politique à l’ensemble -la résistance gauloise teintée de paranoïa face aux légions du libéralisme sauvage à l’américaine.
Un brave entrepreneur en instance de divorce (François Berléand) recueille une jeune femme battue par son mari et l’engage comme secrétaire. Bientôt, la séduisante dactylo devient sa maîtresse jusqu’à ce que tout bascule suite à une scène repompée de La Femme au portrait de Lang : le mari jaloux débarque à l’improviste dans la maison des amants, la jeune femme le tue, et les deux criminels doivent faire disparaître le corps. S’ensuit un thriller à rebondissements multiples et souvent ridicules où se mêlent démesure des conflits (entre une PME de province et de grands groupes capitalistes américains, entre grandes figures du genre et maigres impératifs de la mise en scène), et platitude du moindre effet dramaturgique. Le désir d’en revenir à la transparence classique aboutit à de grosses déflagrations vides (François Berléand quittant brutalement son plateau repas, une bagarre résumée à deux empoignades de cravate), faisant du film un moignon de polar de proximité, presque sauvé pourtant par la croyance de fer du réalisateur en l’efficacité supposée de ses agencements. L’esprit de sérieux et de solennité qui préside à ce déluge de bulles pleines d’enthousiasme explosant à vue (dérapages de Citroën, bataille de hackers et de lobbies informatiques autour d’un bureau Ikéa, Pierre Bachelet en figure tutélaire de l’odyssée intérieure du héros) achève toutefois de faire de ce film à l’ambiance SFP moins palpitant qu’un Nestor Burma -et sans le petit charme- un bifteck sans sauce nageant dans une poêle à frire trop grande pour lui.