Après le carton de Mariage à la grecque, la comédie sentimentale semble décidément avoir le vent en poupe aux Etats-Unis. En témoigne cet Amour sans préavis, qui s’est lui aussi hissé jusqu’à la première place du box office américain, suivi quelques semaines après par Just married avec Brittany Murphy et How to loose a guy in ten days ?. S’il ne s’éloigne pas des stéréotypes du genre (des héros séduisants et un happy end attendu), le film de Marc Lawrence a au moins pour lui une certaine fraîcheur de ton et parfois même quelques grammes d’impertinence. Exit donc la niaiserie des bluettes pour midinettes de tous âges, L’Amour sans préavis prend parfois le risque de briser l’aseptisation générale comme lors de cette mémorable scène où les deux héros, bloqués dans un embouteillage, décide de « louer » les toilettes d’une caravane pour permettre au personnage interprété par Sandra Bullock de se soulager. Réunis dans l’espace réduit du mobil-home, toute la petite famille assiste en direct à la délivrance de miss Bullock qui paye cher de s’être empiffrée quelques heures auparavant. On est donc très loin des « beautiful people » unidimensionnels habituels, merci les frères Farrelly…
L’Amour sans préavis tient en outre beaucoup à l’interprétation presque clownesque de son actrice principale qui multiplie les gaffes, chutes et maladresses tout en gardant sa pseudo-dignité d’avocate. Grâce à son jeu physique, Sandra Bullock assure presque toute seule la fantaisie de cette comédie dans laquelle Hugh Grant -impeccable- se contente d’être Hugh Grant (le beau gosse huppé de service). Fondé sur la confrontation entre les deux héros, d’un côté l’avocate militante de Greenpeace, de l’autre l’héritier richissime coupé du monde, L’Amour sans préavis sait orchestrer le choc créé par le jeu contradictoire de ses acteurs sans tomber dans la farce. Surtout, le film est suffisamment bien dialogué et rythmé pour ne pas souffrir d’éventuels passages creux et rédhibitoires. L’Amour sans préavis ne bouleversera pas le petit monde du cinéma, il se contente néanmoins de perpétuer studieusement un certain savoir-faire de la comédie à l’américaine. C’est déjà pas mal…