Prévenons tout de suite les passionnés : Do you know Squarepusher ?, malgré son attirant poids double, n’est pas un véritable album. Un peu plus d’un an après la somme Go plastic, qui remettait en selle le sieur Tom Jenkinson et le propulsait à 350 BPM au firmament des pierres angulaires electronica, ce nouvel opus se décompose en un mini album sept titres et un CD d’une performance live récente au Japon. Passons d’emblée ce dernier, manifestement enregistré avec un micro d’ambiance et souffrant d’une qualité sonore médiocre (une absurdité pour la musique extrêmement délicate et détaillée de l’anglais) et concentrons nous sur le mini-album qui justifie cette chronique (ce qui fait un double CD pour trente minutes de musique, mais, à nouveau, passons).
Ca commence très fort sur le morceau-titre, que les aficionados connaissent déjà puisqu’il est sorti en maxi anonyme il y a six mois. La réédition en valait largement la peine, tout simplement parce qu’il s’agit d’un des meilleurs morceaux d’electronica (dans le sens strictement britannique et warprephlexien du terme, s’entend) de longue date. Oubliez la stricte débâcle Druqks, Do you know… est une petite merveille où se télescopent 20 ans de musiques électroniques dance et savante, comme si Jenkinson singeait Craig David à l’intérieur d’un canon à particule. Bien entendu, ce sommet stylé, génial et hilarant, est aussi celui du disque tout entier. Ce qui ne veut pas dire que les autres morceaux font du remplissage, loin de là. Mais la grande tentation de l’abstraction poursuit Jenkinson comme un mauvais fantôme, et l’empêche (heureusement) de se laisser happer par la tentation pop en version album.
F-train, qui suit immédiatement le tube sus-cité, en est la version monochrome, froide et désarticulée, un hip-hop de lads branlant et hoquetant qui terrifie autant qu’il fascine. Conk2Symmetriac est une petite extension des inclinations électroacoustiques du garçon (largement explorées sur Music is rotted one note et les nombreux EPs qui l’ont suivis), alors que Mutilation colony étire ses dernières en une suite spatiale et ambitieuse, version réactualisée de l’ancestrale mais séminale B.O. de Forbidden planet par Louis et Bebe Barron. Le disque se clôt ensuite par une reprise chétive et franchement sans grand intérêt de Love will tear us apart (Joy Division, est-il besoin de le préciser). Voilà donc un excellent mini-album explosé, mal assorti, mal présenté, qui donne un peu envie de mettre des baffes à Warp mais qui demeure au final un excellent investissement. Par contre, si vous ne connaissez pas encore Squarepusher, ruez vous plutôt sur le précédent Go plastic. Ou plutôt, achetez les deux. Cindy, on verra plus tard…