Au pays où les groupes de pop, de rock (on ne sait plus vraiment) poussent comme des champignons sur une terre fertile, il est assez difficile d’y voir clair. Après un brainstorming intense, un inventaire de ce qu’on a eu l’occasion d’entendre ces dernières années de l’autre côté de la Manche, la conclusion s’avère limpide. Parmi cette foultitude de groupes british à la hype préfabriquée sur papier glacé, on en ressort finalement que deux ou trois dont on est sûr des qualités intrinsèques : Supergrass, The Electric Soft Parade et… Coldplay.
S’il est vrai que ces trois groupes ne jouent pas exactement dans la même cour, il est également évident que ce qu’ils font respectivement se situe largement au dessus du lot. Une fois cela assimilé, on peut maintenant se pencher sur un point un peu plus obscur, voire énervant. Pourquoi cette surmédiatisation insensée du groupe de Chris Martin ? Les spots sur M6 entre deux émissions débiles, les 4×3 sous le périph’, c’est trop. Coldplay mérite-t-il d’être estampillé « nouveau Beatles » sur une radio pour djeunes à une heure de grande écoute ? Certainement pas. Il ne faut pas prendre les gens pour des benêts non plus. Coldplay est un groupe à l’écriture fouillée, sensible, stylisée. Musicalement, ils ont trouvé la recette magique : la simplicité magnifiquement trahie par une recherche ponctuelle de sophistication dans certains arrangements. Mélodiquement, c’est efficace (ce n’est pas péjoratif), inspiré, et porté par une voix impressionnante. Mais un groupe au premier album somptueux (le titre Don’t panic frisait la perfection) qui sort un bon deuxième album est déjà assez convaincant pour ne pas avoir à en rajouter, et du même coup, dégoûter une partie de l’auditoire présent depuis le début. Tout ceci pour dire que Coldplay est un très bon groupe vendu de façon un peu vulgaire et outrancière. Bref, grosse maladresse…
Revenons à des choses plus convenues. A Rush of blood to the headdonc, titre cohérent pour un disque un poil plus énergique que le précédent. Moins neurasthénique bien qu’aussi introspectif. On frôle tout de même le larmoyant parfois, comme sur le morceau titre ou Amsterdam, dernier morceau attachant mais facile. En revanche, les mélodies aériennes de Warning sign ou Clocks séduiront les adeptes de voyages intérieurs. Sur le reste, la voix de Chris Martin -souvent soutenue par une rythmique mid-tempo entêtante- trace une route éclairée, sûre de sa destination. Les chansons du Coldplay ont ceci de cohérent et d’évident, à l’instar d’un Radiohead de la première époque. La mélancolie pathologique de Parachutes s’est transformée en une douce nostalgie, aux contours parfois ironiques et subtils. On peut ici admirer le groupe pour sa capacité à ne pas tomber dans le piège du copier-coller en s’efforçant de ne pas céder à ses propres démons. De récentes rumeurs insistantes ont établi qu’il s’agissait là du (déjà) dernier album de Coldplay. Dommage, dirons nous. Tant mieux peut-être aussi : les histoires les plus courtes sont souvent les meilleures, paraît-il.