Présenté comme l’un des derniers joyaux de Bollywood, Lagaan n’est pourtant pas un film exemplaire de cette cinématographie. Son budget, largement supérieur à ce qui se fait d’ordinaire, et son histoire, une reconstitution historique se déroulant à l’époque coloniale, en font une exception dans un paysage indien dominé par les comédies musicales bon marché à base d’amourettes entre jeunes bourgeois d’aujourd’hui. Projet ambitieux produit par son interprète principal, Aamir Khan, l’une des plus grandes stars d’Inde, Lagaan est au final bien trop convenu pour nous séduire. Alors qu’on s’attendait à une débauche de flamboyance et à des numéros musicaux et des chorégraphies époustouflants comme seul le cinéma indien sait en organiser, on se retrouve face à une épopée de série B des plus laborieuses.
On aurait ainsi pu passer outre le sujet et ses relents ultra-nationalistes si le film s’échappait de temps en temps de sa narration pour divaguer vers des intermèdes musicaux surréalistes. Or, après « l’Ode à la mousson » au cours de laquelle tout le village participe pour réclamer la venue de la pluie avec force chants et danses, les séquences musicales qui suivent se réduisent à des numéros sirupeux et statiques. Ne reste plus qu’à supporter patiemment le simplisme de l’histoire racontée -en gros, de méchants officiers anglais obligent de pauvres paysans indiens à payer le double du laagan (l’impôt sur les céréales) à moins que ceux-ci ne parviennent à les battre au cricket- et la naïveté de la mise en scène (beaucoup de plans appuyés sur les faciès des acteurs qui miment la colère, la joie ou l’amour comme au bon vieux temps du muet). Mais alors qu’on croyait avoir subi le pire, Lagaan vire brusquement au film de sport, en se concentrant pendant près d’1h30 sur la partie de cricket finale. L’occasion pour les néophytes d’apprendre les règles de ce jeu ou pour les autres de s’échapper vite fait de la salle avant de mourir d’ennui…