La compilation 2002 du label Catalogue est arrivée : fidèle à son esprit d’ouverture, elle réunit en 15 titres des poulains confirmés (Telepopmusik, Avia, Sporto Kantès, William’s Traffic, Bosco) et des artistes non signés ou « gueststarisés ». Mais, en dépit de la joliesse de la couverture design et multicolore, l’écoute s’avère décevante. Après l’intro commerciale des Bosco (et leur Nova screen entendu à la télé), défilent des productions léchées jusqu’à l’indifférenciation, laissant croître et prospérer une ambiance easy listening qui joue involontairement avec le vide et la transparence : voix vocodérisées, gimmicks de claviers, petites ruptures de rythme, ambiances « cinématographiques », petites touches futuristes forment une palette d’effets trop balisés pour provoquer l’enthousiasme.
On est en droit d’apprécier l’approche ludique du label, objectif honorable en soi, mais cette systématisation ne semble pas encore dépasser le stade du simple « consommable ». Au final, c’est une compilation pour enfants sages, à l’imagination limitée et au ton beaucoup trop convenu pour convaincre véritablement. Paradoxalement, ce sont les outsiders qui raflent la mise en instillant une touche d’originalité à ce corpus relativement anémié : on pense en priorité au crescendo electro faussement naïf de Melt, par Berg sans Nipple, groupe formé par deux membre de Songs : Ohia, Purr et Don Nino. On peut aussi dégager le sympathique Evening street des Toulousains San Sebastian, le mignonnet Someday de The Film, jeune groupe bordelais, ainsi que le titre accrocheur de Villeneuve feat M83, Look at me.
Sur le même label, on préfèrera la compilation de Sporto Kantès, The Catalogue of Sporto Kantès, qui effectue un balayage du spectrum musical autour d’une idée forte : le rythme. Bande son idéale du groupe, elle explore le temps, les tensions et les genres dans une série de 12 titres, dont la plupart sont inédits en CD, progressant de la soul jusqu’à des contrées plus hardcore. Après l’introduction roublarde de Claude Vasori, on est titillé par le sex appeal d’Irma Thomas ou des Impressions. On appréciera aussi les surprenants Christian Charles ou Shanti D, ambassadeurs d’un reggae dub onirique et hybride, l’austérité jouissive de la new wave tendue des Young Marble Giants, ou encore le hip-hop solennel de Cannibal Ox et de TTC, les brillants frenchy expatriés n’ayant pas à rougir de leur proximité avec le génial groupe américain. Si l’on oublie les quelques ratés de l’album, comme le rap orchestral poussif de Dgiz ou la pop usée des Tchen Tchen, on admettra que les Sporto Kantès déroulent une bande chronologique personnelle et éclectique, de laquelle se dégage un vrai sens de la filiation, jusqu’à l’apogée du morceau punk clôturant l’album, le Salted city de 1984, saignant et euphorisant. Une compilation à prendre avec toute la légèreté nécessaire, qui impose des tonalités contrastées mais toujours séduisantes.