Guitariste de rock, Artsi a quitté la Finlande pour venir tenter sa chance à Berlin. Son histoire est entrecroisée à celles d’autres galériens, tentant de survivre à leurs échecs et à leur solitude. Comme Fabian, un écrivain quadra obligé de livrer des pizzas, qui se prend d’amitié pour un jeune homme sorti de taule. Peggy, employée de fast food négligée par son copain, un boxeur qui ne pense qu’à sa carrière, décide de le quitter et rencontre Artsi, à la rue et sans un sou…
Ce premier long métrage de Hannu Salonen, se construit par boucles, croisements et rencontres, selon un schéma bien connu du film urbain. Même si cette construction n’est pas des plus originales -ni la vision d’un Berlin hivernal, tout en couleurs glauques et saturées, très riante pour l’oeil- Downhill city capte et maintient l’attention en restant au plus près des personnages, posant toujours la question de leur survie physique et morale, suivant leur déroute avec la même empathie, la même inquiétude pour tous. Chacun est ainsi testé, et surtout Artsi, viré par un patron d’hôtel bonhomme, mais ruiné (leurs discussions forment quelques très jolies scènes), qui se retrouve SDF. Les acteurs parviennent à animer la dérive de leur personnage, par l’humanité et la simplicité de leur jeu, sans que jamais l’on sorte de leurs préoccupation immédiate, de leur perpétuel présent.
Malgré ces qualités essentielles, Downhill city souffre d’un manque d’engagement esthétique. La mise en scène, très sage, n’imprime jamais un véritable rythme au film (la faute aussi à un montage très mou lorgnant à tort vers le documentaire). La caméra donne l’impression de flotter à bonne hauteur, mais sans jamais trouver sa vraie place. Un mixe particulièrement hideux d’images DV et de 35mm, au surplus assez incohérent, n’arrange rien. Dommage que Salonen ait choisi ce traitement visuel misérabiliste allant tellement dans le sens du poil, rajoutant à la grisaille ambiante un aspect Polaroïd éclairé au néon. Ses héros sont pourtant le contraire, pleins de sève et de vie, malgré leur désespoir tranquille. Alors pourquoi ne pas souligner leur grandeur par les moyens propres au cinéma, au lieu de les abandonner à une réalité laide et hostile ? Pourquoi ne pas capter leur grâce quand on a su, par moments, la faire surgir ? Il manque à ce film un « oeil » véritable, capable de sublimer l’expérience de ses héros et de les réunir autrement que par des astuces de scénario.