C’est grâce à la fureur de leur premier rejeton (My pain and sadness is more sad and painful than yours), sorti en novembre 2000 sur le label Fuzzbox, que le trio Mc Lusky s’est fait remarquer. Avec des titres comme Sometimes I have to concentrate et Rods on crutches, ils dressaient alors un pont bizarroïde entre le Wowee zoowee de Pavement et le Plug de Sloy. Entre-temps, la grosse pointure Steve Albini a pointé le bout de ses naseaux et leur a tendu une perche qu’ils ont du bouffer tout cru depuis. A peine ce nouveau disque posé sur la platine, on ne peut s’empêcher de penser que ces trois tordus (Messieurs Chapple, Falkous et Harding) tiennent le rock par les couilles, déplombent bien fort leurs riffs de guitares déglinguées, comme pour mieux enfanter un bitume post-punk bien torride. Bref, ils défouraillent les baffles et frottent leurs queues de guitares sur le ciment, sans pitié aucune. Inutile de s’essayer à une hagiographie pompeuse, les McLusky sont des mineurs déglingués, à qui Albini à donné un putain de studio d’enregistrement, une batterie éclatée, un ampli crade, une basse ronflante et des guitares talées. Les derniers dingues qui nous avaient autant frapper l’encéphale droit était peut-être les tarés de Girls Against Boys et leur fameux House of BVSB (un concentré rock acide mené par Scott McCloud et produit par Ted Niceley, sorti en 1995…). Rock’n’roll mon amour…
Quand les Pixies se cognent la tête contre les murs et font l’amour à Joy Division, les McLusky ne sont pas loin. La rage de certains passages (Alan is a cowboy killer, Lightsabre cocksucking blues) fait également penser aux formations de la famille post-hardcore de Jesus Lizard (Rapeman, Big Black, Scratch Acid…) et plaira sûrement à ceux qui aimaient se faire érafler les tympans par Fugazi, Shellac et autres Butthole Surfers il y a quelques années. Portés par la voix de loup enragé (qui peut aussi bien évoquer Velocity Girl que Cop Shoot Cop) de Sieur Andy Falkous (mi-ange mi-démon) et ses textes écrits au couteau (« Eat what you are while you’re falling apart and it opened a can of worms/ the guns in my hand and I know it looks bad but believe me I’m innocent/ I’m fearful I’m fearful I’m fearful of flying and flying is fearful of me/ I covered my eyes when she told me the news turning me on with my lightsabre cocksucking blues/ are you coming ? »…), McLusky pulse de fréquentes illuminations atonales et jalonne son rock furieux de plages noisy sulfureuses (Alan is a cowboy killer, The World loves us and is our bitch, To hell with good intentions…).
Entre mélodies éraillées et sauts dans le vide barbares, les guérilleros de McLusky redonnent quelques bonnes impulsions à l’organisme rock, sautent à pieds joints sur leurs références et tapent le carton avec leurs fantômes (Fuck this band). McLusky do Dallas est un album plein de vie, de hargne et d’amour maladif, où tout est implosé, exposé… et fracassé (« Relatives matter when your legs don’t work, alcohol matters when you can’t be free, and love is eternal ‘til it isn’t anymore »). Un opus nerveux qui propose quelques recettes apparemment simplistes, mais dont la fougue est tellement impulsive qu’elle en devient par moment quasi-unique. Franck Black et The Breeders (qui ont tous pris du poids, mais dans tous les mauvais sens du terme) peuvent aller se rhabiller.