La rétro-compatibilité, ça a parfois du bon. Tu en as assez des jeux PS2 tout pourris ? Alors joue avec tes vieux jeux PS1 sur ta grosse console next-gen, avant qu’elle ne finisse par croupir sous la poussière. C’est moche, mais au moins ta machine à 3 500 balles n’est plus seulement qu’un lecteur DVD bas de gamme… Evidemment, il y a une contrepartie : une foultitude de jeux se sont maladroitement baladés entre les deux supports durant leur conception. Explication : Onimusha, le dernier survival-horror de Capcom était initialement prévu sur PS1. Problème : ça se voit…
Arrivant bien après Code Veronica (sur Dreamcast), Onimusha souffre énormément de la comparaison. On n’était que moyennement emballé par cette resucée de resucée de la formule Capcom-esque du zombie-killing, mais avouons-le : malgré l’overdose, ce nouvel opus « biohazardeux » était plus long, plus beau et plus immersif, 3D temps réel oblige, que ses prédécesseurs. De plus, Capcom, leader dans le genre pour l’heure, commence à se faire méchamment talonner par la concurrence (Silent hill 1 et 2 de Konami, Parasite Eve 1 et 2 de Square). Changement d’ambiance donc. Fini les promenades post-apocalyptiques dans l’imaginaire de Romero, vous incarnez cette fois un noble samouraï, Samanosuke, chargé de tirer la princesse Yuki des griffes d’un shogun ayant pactisé avec les démons.
Hélas, ceux qui s’attendaient à du folklore nippo-féodal risquent d’être déçus : Capcom ne sait faire qu’une seule chose, décliner son thème de prédilection à toutes les sauces. On ne s’étonnera donc pas de combattre non pas des rônins adeptes du katana, mais des morts-vivants assoiffés de sang, d’entendre parler d' »expériences effectuées sur des êtres humains » ou de lire les fantasmes anthropophages d’un moine en proie aux démons. Des gimmicks classiques du Resident evil de base… On entrevoit mieux dès lors la japonitude de la série phare du survival-horror : derrière les pontes occidentaux de la mega-corporation Umbrella se cachent en fait des ersatz de diables nippons.
Rendez-vous plus ou moins manqué avec le folklore, donc, mais qu’en est-il du jeu ? Si on oublie les décors précalculés d’un autre âge, Onimusha est plutôt agréable à regarder : les personnages sont somptueusement modélisés, plus beaux et expressifs encore que ceux de Code Veronica ou de Shenmue. Dommage, le plaisir est de courte durée : 5-6h en traînant les pieds, c’est court, même pour un survival. Même unité de lieu et de temps que pour l’épisode fondateur de Resident evil… Les amateurs de la première heure apprécieront, mais il manque la longueur et le souffle épique nécessaire pour marquer l’esprit durablement. Vous pourrez toujours recommencer le trip avec un Samanosuke déguisé en… panda ! mais l’effet comique s’estompant rapidement, il ne faudra plus compter pour le replay value que sur l’excellente jouabilité d’Onimusha.
Car c’est sans doute là que le survival-katana de Capcom s’impose le plus. Les combats à l’épée et les déplacements sont d’une rare souplesse. Fini le manche à balai dans le derrière inhérent au genre. Pillant allègrement Soul reaver et Parasite Eve, Capcom a, de plus, implémenté un système d’évolution du personnage, type RPG. En absorbant l’âme des créatures qu’il affronte, Samanosuke peut améliorer la puissance de ses armes et de ses objets. Une excellente idée pour rendre le jeu plus attractif, si ce n’est qu’on perd un peu du concept initial : on ne se sent jamais vraiment à court de vie ou de munitions et surtout, jamais on ne connaît la même angoisse vissée au ventre que lorsque l’on joue à un Resident evil. Difficile de parler de survival-horror dans ce cas-là : Onimusha est un bon vieux jeu d’aventures-action dont le principal défaut est finalement d’être sorti un peu trop tard en Europe. Comparé au formidable Gran turismo 3 ou à l’alléchant Final fantasy X sorti récemment au Japon, Onimusha ressemble encore à un jeu première génération. Pour autant, pas question de bouder son plaisir, malgré sa faible durée de vie et la désagréable habitude qu’a Capcom de bégayer, Onimusha est un jeu tout à fait honorable qui ne fait pas honte à la tradition du genre. Dans une logithèque aussi catastrophique que celle de la PS2 pour le moment, autant dire que c’est un indispensable…