Après avoir habilement rentabilisé le mini-buzz autour des cascadeurs des cités (Yamakasi), Luc Besson ne pouvait pas rester indifférent à la vogue du cinéma d’arts martiaux en train de submerger l’Occident. En producteur avisé, il lance donc cet été son dernier produit qui vise, comme Le 5e Elément, un public international grâce à son casting très « united colors »: une star du kung-fu made in Hongkong, une actrice américaine pour ne pas trop dépayser les Yankees et un méchant bien français en guise d’exception culturelle. Bref, de quoi contenter le plus grand nombre, hormis peut-être les vrais fans des films de combats.
Les productions Besson ont en effet ceci de gênant qu’elles véhiculent la plupart du temps de rances visées opportunistes qui dénaturent imperturbablement le genre auquel elles s’attaquent. Vidés de leur substance et de leur originalité, les sujets sont aplanis pour être broyés par la grande machine de l’entertainment. Avec Le Baiser mortel…, le gros Luc tente une malheureuse exportation des films de combats asiatiques ici transposés dans les rues très tour operator de Paris (en gros Montmartre, la rue St-Denis, la place de la Concorde). On l’aura compris le film n’a de français que ses décors et l’accent prononcé de ses interprètes qui s’expriment tous en anglais. Pour le reste, tout est accommodé à la sauce américaine y compris les fameux combats censés être l’enjeu principal du film. Malgré la présence au générique d’un chorégraphe pour superviser ces scènes (Corey Yuen), on est loin de la grâce et des effets pyrotechniques d’un Yuen Woo Ping. Chargés en hémoglobine et particulièrement violents, les combats du Baiser mortel… relèvent le plus souvent de la baston pure et dure. Jet Li est alors réduit par la médiocrité de la réalisation de Chris Nahon à ne nous livrer qu’un bref échantillon de son agilité. Dommage pour la star, particulièrement bien relookée (merci la coiffeuse) et en forme depuis sa catastrophique performance dans Roméo doit mourir.
En enchaînant gunfights, kung-fu, romance du style Cosette (Bridget Fonda en prostituée au grand cœur dont la petite fille est retenue en otage par son mac) et répliques humoristiques (parfois vraiment drôles, comme la réponse de Tcheky Karyo à la gamine qui lui réclame une Barbie : « All my Barbies are working »), Le Baiser mortel… s’avère un divertissement efficace déjà assuré d’une belle carrière en salles. On regrette pourtant que la collaboration entre l’athlétique acteur et le producteur français n’ait débouché sur un long métrage plus ambitieux au lieu de ne se borner qu’à caresser bêtement le public dans le sens du poil.