Le stoner rock est une niche dans le rock qui s’inspire principalement de Black Sabbath, Hawkwind et Blue Cheer (pour les anciens). Plus récemment, Monstermagnet, Kyuss ou Queens of the Stone Age ont été déclarés champions dans cette catégorie poids lourd. La recette est simple et efficace : grosses guitares avec fuzz et flanger à gogo, rythmiques hyper-lourdes et écho sur la voix, morceaux longs et hypnotiques (à ce propos, quelqu’un se souvient du premier album des Français David Jones Locker ? Une tuerie qui n’a pas pris une ride).
Dans ce registre, Electric Wizard -trio dont la devise est « Legalise drugs and murder »- excelle et leur « trône de dope » est un des disques les plus puissants du moment. Sur la pochette, l’image de Satan fumant un énorme bong donne une idée de la teneur des propos : avec l’aide de quelques riffs très professionnellement balancés dans votre squelette, vous devriez vous sentir quelque temps dans la peau d’un Conan le Barbare du futur. Huit morceaux pachydermiques, donc, dont une trilogie (!) qui ne manque pas d’humour, inspirée par un Weird Tales de 1932 ! On commence par un Vinum sabbath sans équivoque (« Now I’m a slave to the black drug »), très vintage, puis on part à Funeralopolis (« The grey morgue apocalypse ») très très monstermagnetien et jouissif à mourir. La trilogie susnommée, quinze minutes de rock motorisé avec en son centre un Trou Noir digne du film de Disney de 1979, rappelle les meilleures envolées des Melvins, qui ont toujours été trop bizarres pour être catalogués stoner rock. Barbarian est une ode au héros de Robert Howard (« Master swordsman of Hyborian age »), mais aussi aux berserks, guerriers vikings dont les accès de folie meurtrière sont devenus légendaires. Apparemment passionnés de vieille SF, nos amis ne pouvaient pas ne pas évoquer Elric de Melniboné, le très classe héros albino de Moorcock. Ce qu’ils font avec grâce dans le pervers I, the Witchfinder (message aux fans : retrouvez prochainement Elric dans Devil may cry sur Playstation 2). Après ces envolées lyriques mais jamais pompières (on n’est pas dans le registre du black metal, sachez-le), retour sur terre avec We hate you, beaucoup plus agressif et punk, et enfin Dopethrone, mégalithe de vingt minutes que vous aurez du mal à escalader car « il n’appartient pas à l’homme de contempler la face des dieux » (seuls les heureux possesseurs du Metal Hurlant Hors série n° 33 bis « Special Lovecraft » me comprendront).
Avec ou sans cheveux longs, si vous avez l’esprit vagabond et un solide sens du rock psyché et lourd, alors Electric Wizard est un groupe pour vous. Plus lourd que Nebula, plus fin que Kyuss, Electric Wizard est un groupe qui n’invente rien mais qui respecte admirablement une certaine tradition du heavy-rock, ou space rock, ou drug rock… Call it as you want as long as you get stoned !