Il est plutôt rare qu’une institution muséale rende ainsi hommage à une galerie privée ; et il fallait que la galerie soit bien méritante pour attirer ainsi l’attention du grand Beaubourg. C’est en effet une reconnaissance bien méritée que reçoit ainsi Denise René, jeune femme très sensible à l’actualité artistique mais à l’avenir de modiste tout tracé qui s’est pourtant engagée, depuis l’ouverture de sa galerie en 1944, dans la promotion d’un art abstrait géométrique et cinétique.
Comme un galeriste se juge à la qualité de ses goûts, l’exposition du Centre Pompidou présente chronologiquement des oeuvres rattachées à la galerie de la rue La Boétie qui ont depuis laissé une trace dans l’histoire de l’art. Denise René, dans sa constante passion pour l’abstraction géométrique, s’est ainsi appliquée à faire mieux connaître tant les précurseurs (Mondrian, Arp, Sonia Delaunay, etc.) que les avant-gardes tels Deswane, Mortensen, Jacobsen, Vasarelly, Deyrolle ou Aurelie Nemours (dont il faut aller voir l’exposition actuelle à la Bn).
En plus d’oeuvres et d’artistes qui ont fait de Denise René « la papesse de l’art abstrait à Paris », des expositions thématiques ont marqué la galerie ; et celle d’avril 1955 intitulée Le Mouvement, marque un tournant dans l’évolution des formes et de la conception de l’oeuvre d’art. En réunissant des travaux d’artistes dont le point commun est le mouvement non pas virtuel ou simulé mais bien réel, cette exposition fait entrer dans un contexte artistique et culturel, la dimension du jeu incluant directement le spectateur. Cet aspect sera encore plus développé par les membres du GRAV (Groupe de Recherche d’Art Visuel). Ceux-ci posent comme donnée de départ la participation active du public et n’hésitent pas, d’ailleurs, à installer leurs oeuvres dans les rues.
L’exposition Denise René devient donc, par cet hommage rendu à la galeriste dont la foi en l’art construit n’a jamais failli, un éclairage très ponctuel sur une trentaine d’année.