Pour le lancement de l’opération « Euro Fnac Music », Virgin et la Fnac n’ont pas lésiné sur les moyens : des journalistes européens gracieusement invités (Thalys première classe, minibus, open-bar et pass) et une vidéotransmission en direct dans 64 Fnac européennes du showcase de Placebo, visiblement enthousiasmés par tant de visibilité.
Visible, la bannière Fnac en fond de cour l’est tout autant que le fond de teint de Brian Molko en premier plan, qui annonce ce soir, « un cabaret of desire ». Effectivement, le concert est déterminé par la faible contenance de la salle : intimiste et brechtien, plus David Bowie que Marlene Dietritch cependant. Le glam-rock mâtiné de new-wave du groupe anglais se trouve ralenti et ponctué de parties jouées au piano. Brian Molko, star glam-folle, minaude, fait des manières, et chante de sa voix ample des titres adaptés à un comité restreint. On savoure le privilège de voir de près ce groupe très rodé, revenant d’une tournée américaine, augmenté d’un quatrième membre discrètement excentré (hors des caméras ?) à la basse et au synthé. De Special K à Peeping Tom, pour finir par un Slave to the wage fédérateur, le répertoire de Placebo, quoique edulcoré de son esprit punk-rock électrique, nous fait passer un bon quart d’heure (en fait 50 minutes chrono) de pop songs acides et tendues, tandis qu’une caméra au bout d’un long bras mécanique nous frôle le sommet du crâne. Une version de Taste in men raccourcie et accélérée, où Molko empoigne son saxophone, dénote un peu avec une série de chansons apaisées et lyriques, interprétées sans effets de manches. Lorsque Brian Molko annonce une reprise de Big Star, le public, trop jeune ou peut-être trop inculte, applaudit et oblige le chanteur à démentir : « Non, non, ce n’est pas de nous ».
Le final, une version emphatique de Slave to the wadge, voit le public illuminé par les éclairages de la salle, tandis que Molko chante « It’s a race / A race for rats / A race for rats to die ». Finalement, tout le monde reprend en choeur les derniers mots de la chanson, « Run away / Run away » plusieurs fois, avant que le groupe disparaisse, visiblement ému. Je demande en sortant à une fan absolue si ce refrain ne lui a pas donné envie de quitter la salle en courant : « Non, c’est juste un manière de dire gentiment « casses-toi » ». Aussitôt dit, aussitôt fait, me voilà à l’extérieur, dans la froide bruine bruxelloise.
A lire sur Chronic’art :
La critique de Without you i’m nothing
La critique de Black market music
Lire, dans Le Mag, L’enivrante colère de Placebo (septembre 1997)
Voir le site officiel de Placebo
Ici, les prochaines prestations live du groupe