Après des années passées à écrire pour les autres (du meilleur –La Reine Margot– au pire surtout –La Boum, Levy et Goliath, ou, plus récemment, Belle-Maman), Danièle Thompson passe à la réalisation. Et on peut dire que la vieille routière du cinéma de papa s’est fait plaisir : un film en scope, une avalanche de stars, un récit lourd d’humour et de pathos où il est essentiellement question de famille. Comme dans toute comédie française qui se respecte, cette dernière est gratinée : trois sœurs aux tempéraments opposés, un père malade et qui le fait sentir, une mère fraîchement veuve de son second mari. Tout ce petit monde se retrouve, à la veille de Noël, en proie à mille et un problèmes de cœur et d’hérédité.
On pouvait s’y attendre : La Bûche se grise perpétuellement de bons mots, de querelles aux dialogues finement ciselés, d’échanges alertes et efficaces. Mais c’est du côté de l’émotion que la mère Thompson nous surprend davantage, avec, sous forme de regards-caméra, des apartés existentiels et chargés de souvenirs ; des histoires douloureuses marquées par la vie et l’Histoire (Claude Rich évoquant son passage en Suisse lors de la Seconde Guerre mondiale) ; des personnages plus ou moins rattachés par leurs gènes à une culture tzigane (d’où l’importance de la musique dans le scénario, sans compter celle de Legrand hors-diégèse). Malheureusement, ce pan sentimental de La Bûche ne convainc pas vraiment, même si l’on sent que la réalisatrice s’y est investie personnellement. Trop de violons, justement, et pas assez d’audace dans la mise en scène pour faire passer cette overdose de racines mystérieuses, d’enfants paumés et de paternités cachées. Indubitablement, la légèreté sied bien mieux à Thompson, surtout grâce au talent de ses comédiennes : Azéma plus truculente et gouailleuse que jamais en chanteuse dans un restaurant russe ; Fabian prenant un malin plaisir à raconter à son ex comment et avec qui elle l’a cocufié ; Gainsbourg en minette borderline à la répartie qui tue. C’est dans ces moments de joie (on sent le bonheur que Thompson a eu en filmant ses acteurs) que La Bûche parvient à faire vivre ses créatures par ailleurs un peu trop prisonnières de l’écriture scénaristique.