Daniel Calparsoro nous a longtemps laissés avec le souvenir ému de son second film, Pasajes, belle fiction tragique sur un couple de paumées unissant leurs forces afin d’échapper à leur triste destinée. Présentée à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes en 1996, cette production Almodovar n’a pourtant jamais été distribuée en France, contrairement au film suivant, A Ciegas, passé un peu inaperçu, et à sa toute dernière réalisation dont il est question ici. Celle-ci n’est malheureusement pas à la hauteur de l’enthousiasme suscité par Pasajes. Assez médiocre dans son fond comme dans sa forme, Asfalto se confronte à la violence urbaine sans vraiment s’affranchir des clichés propres à la mythologie du film noir. A savoir, une femme fatale (Lucia, alias Najwa Nimri), une sombre histoire de trafics de drogue et un duo de malfrats (Charly et Chino) amoureux de la même créature. L’ensemble est délivré sans surprises sous un emballage très « modern style », avec mère transsexuelle (Antonia San Juan, inoubliable interprète de Tout sur ma mère), carambolages et triolisme à la clé.
Calparsoro a beau imaginer des pistes un tant soit peu ambiguës, ses personnages demeurent désespérément mornes et inexpressifs. Ainsi, après un gros coup qui foire, Charly se retrouve en prison tandis que Chino, protégé par son grand frère policier, revêt à son tour l’uniforme de flic. Mais ni le cinéaste ni ses deux comédiens masculins ne parviennent à exploiter ce retournement de situation. Aussi plat qu’un vulgaire téléfilm de type Hollywood Nights, Asfalto doit ses seuls moments de bonheur à son actrice principale, la surprenante Najwa Nimri, dont le physique étrange a déjà été apprécié chez Medem (Les Amants du cercle polaire) et Amenabar (Ouvre les yeux). Une danse lascive ou un balancement fessier en short moulant de la demoiselle suffisent pendant un moment à combler les lacunes événementielles du récit. Normal, puisque celle-ci est filmée par un homme amoureux, époux de la comédienne dans la vie. On espère seulement que le désir de Calparsoro débordera à l’avenir sur le reste du cadre…