Short cuts du pauvre, Sugar town se déroule dans le milieu de la musique à Los Angeles. Plutôt que de s’attacher aux élus, à ceux qui bénéficient de l’éclat des sunlights, les réalisateurs ont choisi de parler de ceux qui se trouvent à la périphérie de ce monde. Parmi ces banlieusards de la célébrité -une douzaine de personnages environ-, certains tentent par tous les moyens, sans jamais y parvenir, d’être des stars (d’autres l’ont été mais ne le sont plus depuis longtemps).
Alors qu’Allison Anders connaît parfaitement le milieu qu’elle dépeint -la musique est au centre de plusieurs de ses films, dont Grace of my heart, une très belle biographie de la chanteuse Carole King-, ce portrait collectif (co-réalisé avec Kurt Voss) des losers du showbiz est d’une étonnante platitude. Tant du point de vue de sa réalisation -le plus souvent la caméra se contente, comme dans le plus mauvais des feuilletons télévisés, d’enregistrer en plan fixe des acteurs en train de pérorer-, que du « contenu » : banalités sur les affres de l’anonymat ou tout autre sujet aussi peu passionnant et situations déjà vues des dizaines de fois au cinéma ; sans compter qu’aucun des personnages du film n’est réellement attachant. Leur refus obstiné et narcissique d’être un vulgum pecus en fait, à des degrés divers, des êtres pitoyables. D’autant plus que les réalisateurs ont eu la fausse bonne idée de les faire interpréter par de véritables ex-idoles des années 80, du rock (les chanteurs de Spandau Ballet et de Duran Duran) ou du cinéma (Ally Sheedy, qui malgré son joli come-back l’année dernière dans High art, risque rapidement de retourner dans le placard où on l’a reléguée durant des années si elle ne choisit pas ses rôles avec plus de discernement). Voir ce club des « ex », des quasi-quadras tentant de réprimer leurs bourrelets dans des jeans trop serrés, coiffés et habillés comme s’ils avaient vingt ans, est on ne peut plus pathétique.
En matière de stars déchues, figées dans un passé idéalisé, on préfère de loin le chef-d’œuvre de Billy Wilder, Sunset boulevard, ou une version bien plus drôle et vulgaire à la TF1 où l’on nous montrerait une Chantal Goya en train de se trémousser déguisée en Bécassine. Voire une Jeanne Mas entonnant pour la millième fois « En rouge et noir ».