A l’écoute de 7-Hurtz (notamment le très réussi Audiophiliac) ou de leur récente compilation (avec Fridge, Circlesquare ou LB), un certain intégrisme sonore se laissait percevoir chez Output… Rythmiques binaires, sonorités de synthèse granulaire et autres claviers vintage se suffisaient tout simplement à eux-mêmes, pour établir une electro à la fois extrémiste et réfléchie. Mais avec ce type de musique, le label anglais ne s’est que trop peu démarqué des abondantes productions du même cru, qui inondent actuellement les bacs à disques…
Fort heureusement, les voici de retour avec un projet imprévisible, se détachant brillamment de tous les clichés technoïdes du moment : Sonovac. D’entrée de jeu, avec Human Fly, l’ouverture de l’album est déstabilisante : sur fond de sonorités analogiques turbulentes se pose subitement une ligne de guitare surf passée au Tremolo (façon Marble Ochard ou Huevos Rancheros !). Sur ce mélange audacieux arrive ensuite une voix féminine saturée, soutenue par une armée de rythmiques explosives. Ce qui fait tendre le tout vers une sorte de rock’n’roll halluciné, que PJ Harvey aurait pu réaliser en collaboration avec Add N To (X) et Sneaker Pimps… Dans un style beaucoup plus conventionnel, citons aussi I don’t want nobody else but you, ballade romantique passée au crible de l’electro minimaliste. Rythmiques et mélodies répétitives, peu de paroles énoncées… Seul l’essentiel a été gardé, en fait : la phrase du titre doit être répétée une trentaine de fois, pour être modulée dans tous les sens par un processeur d’effet ne rendant le chant que plus écorché et émotif… Encore un basculement inattendu avec Heart broker, acid funk déjanté à mi-chemin entre Deelight et Peaches. Pareil pour Uh-oh love, électro punk cacophonique, guidé par des guitares agressives et bordéliques à souhait, clairement inspirées par ce que donnait Sonic Youth à l’époque de Goo et Dirty. Nouveau revirement de situation avec AC/DC, un rock psyché dadaïste, où les Residents rendraient hommage au célèbre groupe de hard rock australien.
Pour finir ce tour de l’album assez sommaire (mais comment parler des 16 morceaux, alors qu’aucun ne se ressemble…), penchons-nous sur cette reprise énigmatique des Ramones : I wanna be sedated. Ici, la batterie impulsive a été remplacée par un kick de boîte à rythme bouclé lentement. Les irascibles guitares ont laissé place à des synthés aux lignes hasardeuses ; et le chant obsessionnel d’origine est assuré par deux voix balbutiées, s’épaulant pour énoncer la totalité des paroles du morceau. Une version qui aurait pu être interprétée par les Ramones eux-mêmes, après avoir forcé la dose sur les sédatifs… Ce qui nous aide peut-être à vaguement résumer l’esprit de ce disque psychotrope. Raw est un album de rock. Du rock revisité comme il se doit, à l’aide d’instruments d’hier et d’aujourd’hui ; et défiguré aux moyens de substances sonores narcotiques, communiquant tantôt l’euphorie, tantôt la dépression. Mais aucun doute là-dessus : c’est un album de rock.