Issu de la collection « Petites caméras », Nationale 7 marque le retour sur grand écran des téléfilms produits par Arte et la fin de la polémique liée à ce sujet (désormais la chaîne culturelle ne sortira plus au cinéma que six fictions par an). Le film, présenté par ailleurs dans plusieurs festivals, a remporté de nombreux prix et le mérite amplement. Réalisé en DV, comme le suggère le titre générique de la collection, Nationale 7, sous ses abords de petit film fait avec les mains, se révèle surtout conçu avec le cœur.
Adapté d’un fait divers que seule la fin nous suggère de façon inattendue, le film s’immisce dans le quotidien d’un asile de déficients physiques. Parmi eux, René (Olivier Gourmet, « le père » dans La Promesse des frères Dardenne), personnage au sale caractère, n’a qu’un désir, celui de faire l’amour. Il demande à Julie, nouvelle arrivée parmi l’équipe d’éducateurs du centre et seule personne à le comprendre, de lui trouver une prostituée. La situation s’avère alors éminemment cocasse pour l’ensemble des responsables de l’asile, puis des autres malades qui comprennent vite ce qui se trame derrière eux… Avec un programme si chargé, Nationale 7 aurait pu s’orienter vers un exercice de critique sociale moralisateur tendance Haneke, mais Jean-Pierre Sinapi a su éviter les travers de l’Autrichien par la grande modestie qu’il manifeste face à son sujet. Surtout, il réussit à s’évader des clichés par le biais de la comédie. Les personnages sonnent juste, dédramatisant par avance chaque situation. La scène où Julie, munie d’un mètre, se met à mesurer la largeur des portes de caravanes des prostituées pour s’assurer du passage du fauteuil roulant de René, en est l’exemple le plus parlant. Même s’il faut avouer que la plupart des rôles de handicapés sont dévolus à des comédiens professionnels (mention spéciale à Gérald Thomassin, totalement méconnaissable), on ne se sent jamais mal à l’aise face aux personnages. Il est probable que l’utilisation de la caméra numérique y est pour beaucoup. En gommant toute grandiloquence, désormais inhérente à la plupart des réalisations en 35mm, la DV ramène à l’écran quelque chose proche de l’humain, l’humble imperfection.