Une Mercedes fluo en vision stroboscopique. Belle illustration de l’esthétique de ce mini-album, la pochette résume succinctement les grands traits symbolisant la rencontre entre les deux projets germano-anglo-electro Schneider TM et KPT Michigan. La rencontre aidant, les désirs mécaniques de Schneider TM se mêlent en six titres courts au strass paillettes-champagne assez agaçant de Michigan, aka Michael Beckett. Ne nous y trompons pas, Binokular n’est pas la suite de Moist, bien au contraire. Les rythmiques électroniques scintillantes qui avaient fait la force du premier opus de Dirk Dresselhaus sont vite estompées par le travail glam-electro de Beckett, vieux compagnon de scène.
L’ouverture de l’album avec Chotto Matte laissait pourtant augurer un travail dans la continuité : mêmes affects technoïdes et drones répétitifs, même agression sonore maîtrisée. Soulignée par un travail remarquable au niveau du temps et du contretemps, toute la mise en place rythmique de Moist se voit ainsi améliorée par un travail mélodique étonnant. Cette synthèse convaincante de la culture electronica de Dresselhaus est malheureusement rapidement prise à contre-pied par la pollution easy-listening de son camarade de jeu. Dès Testton 2, signé Beckett, l’effet nocif est installé, saccageant l’espace sonore à grands coups de séquenceurs à bruit blanc trop propre pour être honnête. L’entreprise de destruction continue avec deux très agaçantes tentatives electro-pop (Onnanoko et Ray nox), plus catastrophiques encore que le dernier album d’Add (N) to X. Mark Van Hoen avait réussi le mariage techno-dialectique de l’electro et du chant pop dans Scala et Locust, Beckett et Dresselhaus se fourrent quant à eux le doigt dans l’oeil.
Le plantage est encore plus grand à la fin de l’album avec la reprise inattendue des Smiths, vieux héros adolescents des deux comparses, et qui finalise en toute beauté les aspirations electro-funk de ce one-shot. Si le passage à la moulinette du remix de l’hymne des Smiths (There is a light that never goes out) est plutôt intelligent dans sa construction rythmique, les dysharmonies vocales de la bande à Morissey ramènent l’auditeur dans sa petite vie de merde, tout droit sortie des Années collège ou de 21 Jump Street. A trop vouloir effectuer une symbiose d’univers opposés, Dresselhaus en perd sa techno-sémantique.