« Ce côté hystérique des femmes dans mon film, je l’ai voulu absolument, même si c’est casse-gueule, parce que c’est une réalité. J’en sais quelque chose, moi qui n’ai été élevé que par des femmes et qui fuis leurs cris ! » Le ton est donné dès la première réponse de l’interview du réalisateur dans le dossier de presse. Le jeune homme a choisi avec son premier film de régler son compte avec la gent féminine qui l’aurait terrorisé, enfant… Résultat à l’écran : des scènes de crêpage de chignon à répétition. La propriétaire hurlant sur les locataires, la mère sermonnant violemment sa fille, l’épouse délaissée s’acharnant telle une harpie sur celle qui lui a « piqué » son mari… Seule la fille de madame Ousmane, Sakina, reste étrangère à ces prises de bec. Mais elle ne survivra pas au film.
Le Harem de madame Ousmane n’est donc pas, on l’aura compris, une énième « orientalade » sur le thème « exauce le fantasme masculin de la vision de femmes lascives collées les unes contre les autres dans une ambiance moite propice aux rapprochements corporels pour attirer un max de monde dans les salles obscures ». Situé dans l’Algérie du début de la guerre civile (1993), le film fait en réalité le portrait d’une maisonnée menée de main de maître par madame Ousmane (Carmen Maura, toujours très speedée). Le contexte de violence environnant est très peu évoqué directement, tant cette population aisée a d’autres préoccupations en tête. C’est l’amour et, plus précisément, le désir physique non assouvi qui sont les véritables moteurs des relations entre les personnages. Le terrorisme, pourtant, surgit finalement pour mettre un terme à ce déchaînement des passions.
La guerre civile en Algérie comme résultante de l’impossibilité d’aimer librement ? Sans sexe, les hommes sont désaxés au point d’utiliser leurs kalachnikovs comme ultime réassurance phallique ? Voilà l’hypothèse avancée par le réalisateur Nadir Moknèche. Elle a le mérite d’être originale et de nous montrer l’Algérie sous un nouveau jour… Pour autant, est-ce le plus juste ?