L’ouverture du film est signée : Mission to Mars débute par un plan-séquence virtuose. La caméra survole un barbecue, se faufile entre les invités et en moins de dix minutes les personnages sont caractérisés, leurs relations définies. La première mission américaine à destination de Mars est sur le point de partir et, comme dans le plus banal film d’aventures, l’équipe au complet nous est présentée : les élus, ceux qui auront la chance de fouler pour la première fois le sol de la planète, et les autres, ceux qui font partie du voyage mais pas de la grande aventure puisqu’ils resteront dans la station spatiale. Entre saucisses et bières, il faut avaler le plus vite possible le fait que le commandant Blake (Tim Robbins) file le parfait amour avec Terri Fisher (Connie Nielsen), que Luke Graham (Don Cheadle) est ravi de partir mais qu’en même temps il éprouve un certain malaise car il remplace celui qui selon tout ce petit monde aurait dû faire partie de l’expédition, Jim McConnell (Gary Sinise). Mais voilà, Jim, qui a préparé le voyage pendant plus de dix ans avec sa femme, vient de la perdre… Asséné à coups de dialogues lourdauds, un maximum d’informations nous est donné en un minimum de temps, difficile de digérer dans ces conditions. Mais après tout, Brian de Palma veut peut-être se débarrasser au plus tôt de cette corvée, présenter une fois pour toutes l’équipe avant de passer aux choses sérieuses.
Malheureusement, cette première séquence est emblématique de Mission to Mars ; elle n’est pas comme dans Snake eyes une scène matrice du film à venir, mais plutôt une sorte de parasite qui va détruire le film de l’intérieur. Car si Mission to Mars fait preuve d’une certaine inventivité visuelle (les séquences en apesanteur ou encore cette scène magnifique où l’un des pilotes est blessé et que son sang flotte dans l’habitacle du vaisseau avant de s’échapper dans l’espace par une fissure pour aussitôt se solidifier), il est sans cesse rattrapé par sa nature profonde : celle d’un cinéma hollywoodien dont l’unique objectif est le divertissement. Ses prouesses techniques et ses séquences spectaculaires ne peuvent faire oublier la naïveté de l’ensemble, le fait que Mission to Mars est un film primaire à bien des égards. La séquence finale d’une sensiblerie et d’une niaiserie confondante permet de boucler la boucle. L’équipage rencontre enfin l’extraterrestre qui ne manque pas de verser une larme tout en expliquant grâce à une mystique de bazar les origines de l’espèce humaine. Mission to Mars établit alors de manière définitive sa parenté, non pas du côté de Kubrick, mais plutôt de Spielberg ou Zemeckis. Brian de Palma n’en est pas à sa première incursion dans le cinéma hollywoodien mais rarement il aura aussi peu tiré parti de son matériau de base. A sa décharge il convient quand même de préciser que le film devait être tourné par un autre cinéaste. Lorsque Brian de Palma est arrivé pour le remplacer le projet était largement entamé, le scénario déjà écrit…