Le label Ninja Tune nous a récemment apporté deux pièces de taille : Carpal tunnel syndrome de Kid Koala et Kaleidoscope de DJ Food. Bonne nouvelle : ces sorties étaient accompagnées d’une tournée, nos deux hommes se partageaient l’affiche pour une soirée à Paname.
Ouverture des portes à 20h. Progressivement, la salle s’emplit. Un DJ arrive alors pour la première partie (un mix de house qui n’a d’autre intérêt que celui de chauffer le public), les gens commencent à se trémousser et le New Morning continue de s’emplir. Vers 21h, la salle est comble. Impossible de bouger. Entre en scène Patrick Carpenter (DJ Food) qui prend le relais aux platines : dans la lignée de la première partie. Déception… Le dernier album de DJ Food a beau être exceptionnel, la prestation live donnée ce soir n’est pas vraiment convaincante…
Puis vient le génial Kid Koala. Tenue décontractée, sourire aux lèvres, Eric San s’adonne tout d’abord à un long mix en solo. Voir ce jeune Américain sur scène est tout simplement impressionnant : chacun de ses mouvements coïncide parfaitement avec les sons diffusés ; et autant dire qu’il bouge très vite ! Contrairement aux mixes précédant le show de Kid Koala, chacun reste immobile et ébahi devant sa prestation. Les vinyles défilent, il les enchaîne plus vite que la musique (un roadie très actif demeure constamment derrière lui afin de lui passer les disques les uns après les autres). Mais il ne s’agit pas ici d’enchaînement de morceaux à proprement parler : Eric San construit sa propre musique, en ramenant le 33 tours au rang de matériel brut… L’exemple le plus flagrant est ce passage où -sur un rythme et une boucle de basse- le jeune DJ s’amuse à créer ses propres mélodies, en modulant la vitesse de défilement du disque, en levant et abaissant le diamant de la platine. C’est incroyable, les mélodies sont en accord avec la ligne de basse, les phrases jouées à la mesure des boucles qui défilent ! Le sieur Koala a bien démontré ce soir que le vrai DJing est avant tout un travail de musicien, et non de technicien.
Puis, d’autres musiciens interviennent. Un groupe d’acid-jazz, Bullfrog (basse, guitare, batterie, percussions), accompagne le Kid pour un des morceaux revisités de Carpal tunnel syndrome. On retiendra notamment l’hallucinante version (longue) de Music for morning people, durant laquelle Eric San se défoule sur ses platines, alors que Bullfrog part dans des délires d’improvisation fulgurants. Petite cerise sur le gâteau : Kid Koala nous présente son acolyte, le talentueux DJ Peanuts. Imaginez ce que peut donner le final d’un tel concert, lorsque deux scratcheurs furieux se démènent sur six platines et qu’un groupe crache son groove survolté… Dès la fin du show, le stand est assailli par le public encore sous le choc. Les disques de Kid Koala se vendent comme des petits pains et le stock est rapidement écoulé.