Ce fut une quinzaine parisienne très chargée pour les concerts, une quinzaine très variée et de bonne tenue qui plus est. Tout a commencé avec le retour de Jason Pierce, ex-Spacemen 3, désormais Spiritualized, à la Maison de la radio, pour un concert donné dans le cadre des émissions de Bernard Lenoir. En règle générale, ces fameuses Black Sessions ne dépassent guère l’heure. Mais là, c’était difficile avec des morceaux qui durent rarement moins de dix minutes : bientôt en tournée française après la sortie de Ladies and Gentlemen We’re Floating in Space, Jason Pierce a brillamment prouvé que ses compositions psychédéliques, hypnotiques et quasi hallucinatoires ne perdaient rien en passant sur la scène. Douces mélodies entrecoupées de lancinants rugissements de guitares, solos de saxos, impitoyables séances de bottleneck… On comprend que le chanteur ait déclaré : « incorporer de plus en plus de moments d’improvisations collectives, un peu à la manière des musiciens de jazz mais tout en gardant le cadre des morceaux. » C’est sans doute une des grandes forces de ce groupe : quand tant d’autres se contentent sur scène d’une resucée de morceaux enregistrés en studio, eux s’engagent avec force sur des terrains inconnus. C’est moins le cas des Tindersticks et cependant, c’est leur set qui restera dans les mémoires bouleversées des auditeurs : la beauté mélodique de leurs albums, associée au minimalisme de la voix rauque de Stuart Staples et à la présence de cordes entêtantes grâce à un violoniste impressionnant de maîtrise, tout ça produit un cocktail où émotion et force mêlées prennent à la gorge. Tripant. Hélas, leur première partie, Cornershop, a fort peu bénéficié des faveurs du public, alors clairsemé : pourtant, ils l’auraient mérité, avec des morceaux décalés et très différents du mainstream musical britannique actuel, soutenus par des instruments traditionnels (drôle de guitare dont on joue assis, percussions, etc).
Les origines indiennes du chanteur n’y sont pas pour rien. Impossible de faire rentrer dans une catégorie prédéfinie cette musique à mi-chemin entre un Beck assagi et une Natacha Atlas soudain devenue indienne. Et c’est tant mieux. Par contre, après le concert promo des Stereophonics, on savait tout de suite à quoi s’en tenir : le trio gallois fait de la Britpop comme on la connaît si (trop?) bien, une Britpop mélodique, rapide, musclée. Oasis, autrement dit. Mais un Oasis un peu moins lourdingue, un tantinet plus dynamique et gai. Alors ne boudons pas notre plaisir, puisque s’ils n’ont rien inventé, ils le font vite et bien. On les reverra volontiers, du coup, à l’automne prochain.
Stéphane Buron