Hocine Dihimi, dit Yamaha, a été assassiné à Alger un soir de juin 1995. Il était le plus célèbre supporter du football algérien (et avant tout celui du club de Belcourt), héros populaire d’une Algérie au bord du chaos, en passe d’être ravagée par le fanatisme. C’est initialement pour une autre raison -la rédaction d’un article sur l’économie du pays- que Maurice, reporter, s’est rendu sur place. Il débarque à l’aéroport dans un climat de torpeur, le jour de la mort de Yamaha. Là commence son enquête. Pourquoi a-t-il été tué ? Une investigation particulière puisqu’elle amènera son auteur à un véritable parcours initiatique sur une terre qu’il connaissait si peu. Il recueille les témoignages de ceux qui ont connu ce garçon turbulent et amoureux d’un sport qui déborde ce simple cadre pour déboucher, parfois, sur une unité improbable d’un corps social tout entier, au moins à l’échelle d’une ville (un parallélisme pourrait être dressé avec Marseille). Plusieurs allers et retours entre Alger et Paris lui seront nécessaires pour déterminer ce qui l’attire tant dans cette histoire ayant valeur de symbole pour toute une communauté -et toujours le souvenir de cette figure charismatique dont il n’arrive pas à se défaire.
Et puis il y a ce passage hallucinant, à la fin du livre, la diatribe du coiffeur (digression). Le long monologue d’un homme attaché à son pays, blessé, à fleur de peau, et qui évoque avec verve, mais aussi bonhomie, la situation politique présente en fonction de facteurs historiques antérieurs. La guerre civile perpétuellement rejouée là-bas n’en est pas absente. Et l’on sait que qu’elles que soient les victoires remportées par l’un des deux partis, c’est toujours une défaite qui a lieu. Tous ces éléments font de ce court récit d’une sobriété exemplaire l’un des témoignages les plus justes qu’on ait pu lire sur l’Algérie.