Ces jours-ci, un livre m’apparaît tout à fait neuf. Il date pourtant du début des années 60. Son titre : L’île aux chimères. Son auteur : Norman Lewis. De lui, nous connaissions déjà plusieurs volumes judicieusement réédités, ou simplement édités, par les éditions Phébus (Le Chant de la mer, Comme à la guerre, pour ne citer qu’eux). Car tout est romanesque chez cet auteur américain célébré par Bruce Chatwin et Nicolas Bouvier (entre autres). A leur égal, cet étonnant voyageur parcourut l’europe durant et après la guerre (C.F. Naples 44), après avoir servi dans l’armée et participé à la libération.
C’est dans une petite île des Canaries -à Vedra- qu’il découvrit une communauté recluse, échappant encore aux démons techniciens de l’époque, avant de sombrer, via quelques industriels peu scrupuleux, dans la modernité. Cette chronique désenchantée évoquant un monde finissant où se conjuguaient art de vivre et honneur recèle cependant de moments irrésistibles de drôlerie. Nous imaginons sans mal que l’auteur a tout noté, tout écouté, et tout vu des scènes qui se déroulaient sous ses yeux. Mais cela ne serait rien sans la grâce d’une écriture « toute simple », au plus près des choses et des gens, et que seuls les plus grands peuvent se permettre. Une grâce qui paraît inépuisable.