Retour à la maison du Père. « Captif des deux prisons », la cécité et la maison qui lui servit de refuge, comme l’annonce le préfacier de ces Chants de la nuit extrême, ce penseur et poète arabe iconoclaste vécut la perte. Pour en surmonter les affres, une seule issue : la création. Végétarien, ne s’encombrant pas de femme(s), pas plus que de la fréquentation assidue des hommes, il préféra bâtir une œuvre. Cette misanthropie, il la cultiva comme un jardin secret. Tout en laissant traîner ses oreilles partout, afin de prendre la température du monde. Ce qu’il entendit ne lui plut guère. Rapidement, il en conclut qu’il avait affaire à des fous. Tournant en dérision la bonne conscience des hommes, leur fatuité, et toutes choses meublant leurs misérables existences, il entretint un dialogue permanent avec le divin. Le salut des hommes ne lui fut pourtant pas étranger. « Ne sois pas hautain ! La hauteur ne sied qu’à Dieu/Surpassant toute parole/Ne vois-tu pas que la mort/Nous abuse en se jouant de nous ». Mais encore : « La raison a beau être une chose précieuse/Au-dessus d’elle le destin dispose de tout ». Le propos est celui d’un virtuose. Et d’un moraliste. Chacun de ses vers est une maxime en soi : « Et comment passer une heure dans la joie/Sachant que la mort est parmi mes adversaires? ». Une maxime à l’usage du monde (qui n’en a pas tiré grand profit). Il n’est pas impossible que Dante s’en soit inspiré pour La Divine comédie. Bref, c’est un classique !
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