Loustal est un grand voyageur. Et lorsqu’il part à la découverte de nouvelles contrées, il revient ses valises chargées de souvenirs à partager avec ses lecteurs. L’observation des créatures étranges qui peuplent les îles Galapagos, les haltes dans les bars du Bénin au détour d’une piste, l’ascension du Mafa Mafou, la remontée du Nil, les îlots d’amoureux non loin de la mer Egée, le dimanche matin à Central Park sont croqués avec tendresse et simplicité. Loustal n’oublie pas ses compagnons de route, comme Serge, Jules ou Augustin et ses rencontres multiples, comme celle avec le photographe de Grand Bassam ou avec « les popes qui surgissent de toute part ». Il aime saisir dans l’instant les moments de fête, de contemplation, et nous communique son plaisir de flâner et de s’ouvrir sur l’inconnu et parfois l’insolite. Construit à l’image d’un album de photos-souvenirs, ce carnet est accompagné de commentaires brefs, indiquant des noms de lieux ou de personnages locaux, croisés dans les villages ou dans les rues des quatre coins du monde. Certaines scènes sont en couleurs, d’autres sont en noir et blanc. Des anecdotes sur les us et coutumes, sur l’heure ou la saison de son périple donnent à l’ensemble l’impression que chaque moment a été « immortalisé » avec soin et émotion, comme s’il ne voulait pas que le temps efface certains détails qui font tout le charme de l’étape.
Loustal fuit l’esthétique « carte postale » et préfère donner au voyage sa dimension réelle, en indiquant par une remarque les imprévus, l’émerveillement devant quelque chose qui peut paraître banal dans son propre pays, comme une silhouette qui s’avance dans une rue de Pékin ou des poissons qui barbotent dans l’eau. Tout cela prend tout d’un coup une dimension poétique ou exotique, lorsqu’on s’accorde un moment pour l’observer.
En ces mois d’hiver, des chapitres comme ceux consacrés à la Grèce et à l’Egypte donneraient presque envie de foncer dans une agence de voyage et d’acheter un billet pour le soleil. Le trait change selon le pays que le dessinateur traverse et la tonalité globale est plutôt empreinte d’une certaine nostalgie malgré son humour et son regard amusé. On parcourt cet album avec un plaisir qui s’apparente à un pur moment de récréation. Seul regret : quelques croquis auraient mérité d’être accompagnés d’une légende, d’autant que les remarques faites à d’autres moments apportent toujours un éclairage drôle et original, comme l’accident en deux-roues sur les routes sinueuses de Grèce.