Pour son premier album, Grégory Mardon a choisi de raconter la vie de son grand-père, Adolphe Hérault de son état, mais « Dodo » pour tous. A seize ans, Dodo décide de mettre les voiles. Il est apprenti boucher et rêve de sillonner les mers et de vivre toutes sortes d’aventures, le plus loin possible de Douai et de sa métallurgie. Son choix est fait, il s’engage dans la marine et embarque sur un croiseur en qualité de matelot-cuisinier au cours de l’hiver 37, ou de l’été 38. Le périple commence, les escales sont l’occasion de franches rigolades, les parties de water-polo dans des eaux infestées de requins, les sauts de l’ange acrobatiques lui permettent d’évaluer son courage. Dodo explose le record de sanctions disciplinaires, mais ses aptitudes physiques le rendent indispensable et ses supérieurs hiérarchiques n’hésitent pas à écourter ses séjours au cachot pour relever le niveau des équipes et défendre l’honneur du bataillon. Dodo soulève de la fonte, aime se mesurer à de gros molosses entre quatre cordes et sentir les gouttes de sueur perler dans sa nuque. Alexandrie, Djibouti, Ceylan, Singapour et Saigon offrent des nuits de débauches mémorables, même si un petit bal musette serait parfois le bienvenu…
Mers el-Kébir va mettre fin à cette douce insouciance ; une autre vie commence pour Dodo, celle de chef de famille, en compagnie de la douce et tendre Carmen. L’âme n’est plus à la camaraderie, la guerre d’Algérie va bouleverser sa vie. Le retour dans le nord de la France va être rude, le sable et l’eau n’ont pas exactement la même température.
Drôles et expressifs, les dessins de Grégory Mardon trahissent une grande nostalgie en souvenir des jours où pépé Adolphe lui ouvrait son cœur et se mettait à fredonner des airs de jeunesse. Il retrace l’itinéraire de cet homme attachant à bien des égards. Courageux, téméraire, comme beaucoup d’ »anonymes » qui ont connu plusieurs guerres et n’ont pas vécu ce qu’ils auraient dû vivre. Dodo s’accroche à ses rêves, marche droit et lutte pour ne pas renoncer à ses premières amours. A défaut du reste, son jardin secret est resté intact. Sa femme, il l’adore, ses enfants sont sa fierté, mais il aurait aimé leur offrir le soleil d’Alger ou de Tunis.