« The true artist helps the world by revealing mystics truths » Arrivé sur place, non sans avoir consommé ma stupéfaction face à la grandeur et la fadeur du tipi géant, je rentre dans la zone d’exposition minimum, rue Saint Merri (le temple étant fermé pour deux ans…). Qui est-il ? Que fait-il ? Bruce Nauman (né en 1941, à Fort Wayne dans l’Indiana) est ce qu’on pourrait appeler un artiste multimédia. Son travail s’il devait être qualifié, serait un subtil mélange de mises en scènes théâtrales, de minimalisme et de cinéma expérimental, le tout à la sauce conceptuelle. Nous pourrions peut-être y voir une révision des problèmes esthétiques depuis Duchamp (notons que ces dits problèmes remontent bien plus loin dans le temps si l’on prend comme point de repère une chronologie linéaire.)
Bruce Nauman est un artiste qui ne conçoit plus l’oeuvre comme une surface
mais comme un volume (souvenez vous de l’expo du vide de Yves Klein en mai 58 à la Galerie Denise René). Il crée une ambiance. Son exposition à Beaubourg est un espace-temps artistique où l’on progresse à la recherche du minotaure crée par la superposition des effets sonores vocaux et minimalistes. Rentrer dans ce dédale, c’est sortir d’un monde borné et approcher le noyau de questions en fusion.
En dépit d’une construction de l’ensemble en spirale labyrinthique, il y a
de toute évidence une volonté de symétrie. Nous évoluons vers le coeur du travail de l‚artiste, vers des oeuvres-limites. Exemple : Get out of my mind, get out of my room présente une pièce vide, repeinte en blanc (l’odeur traître et enivrante de la peinture hante le lieu) avec pour seul décors une pauvre ampoule qui s’accroche à son plafond.
Le titre de la pièce est en fond sonore et nous exhorte à sortir sur le champ.
Abuserions-nous de l’hospitalité de l’esprit quoique vide de l’artiste ? C’est nous qui faisons l’oeuvre ! Ici, est mis en scène et en son le caractère paradoxale du faiseur d’art, donc le nôtre.
Une pièce vide qui transpire l’humanité. Notons aussi que l’oeuvre pourrait aussi se passer du titre, l’ancrage étant fait par de l’immatériel pur : du son.
Le centre de l’exposition s’appelle Consumate mask of rock 1975, où seule une planche plus ou moins manuscrite permet une éventuelle compréhension : » People die of exposure Sanctuaire « , âme de l’exposition.
Il s’agit donc d’un véritable parcours initiatique, ce qui est tout à fait dans la logique intemporelle des arts. Cependant cette exhibition est un peu difficile, ce qui peut barber légèrement. En plus, il faut reconnaître qu’on ne se rend pas très bien compte de l’évolution chronologique de l’Oeuvre, il aurait fallu plus de travaux actuels. Faut-il se demander si c’est là une volonté de remettre en question la notion de temps surtout avec cette mode débile de comptage à rebours jusqu’à l’an 2000.
Temps cyclique ou linéaire ? Il aurait été dommage de trop en dire sur les travaux de Bruce Nauman. C’est un artiste surprenant et incontournable, et si l’élitisme intellectuel est quelque peu insupportable, son travail brise quelques-uns des stéréotypes du monde de l’art.
Jusqu’au 9 mars 1998 au Centre Georges Pompidou (Paris).
Tous les jours, sauf le mardi, de 12h (10h le samedi et le dimancje) à 22h.
Renseignement : 01 44 78 12 33