Aujourd’hui, le nom de Don Bluth est en règle générale associé à des films comme Anastasia, Rock-o-Rico ou encore Fievel et le nouveau monde… Cependant, le réalisateur a aussi exercé par le passé, dans un cadre bien différent de celui des majors hollywoodiennes, en tant que concepteur / dessinateur de jeux vidéo. A mille lieues des pressions imposées par Disney ou la 20th Century Fox, il a notamment développé les mythiques Dragon’s Lair et Space Quest ; jeux conceptuels mêlant passages de dessins animés et séquences jouées… En plus du système très innovant pour l’époque, Bluth s’est forgé une solide réputation grâce à l’univers singulier qu’il développait : atmosphères intemporelles, créatures à la fois cartoonesques et effrayantes… Avec Titan A.E. il revient enfin à son style d’antan et l’applique pour la première fois à un long métrage.
En majeure partie destinée à un public adolescent, l’intrigue du film reste malheureusement un peu simpliste. Au XXXIe siècle, la Terre est détruite par des assaillants venus d’une autre galaxie, les Drej. Une poignée de survivants tente de leur échapper et de retrouver le vaisseau Titan, Arche de Noé futuriste contenant les échantillons ADN nécessaires pour recréer une réplique du globe terrestre. Pour ce qui est du scénario, si Don Bluth ne figure pas parmi les plus inventifs, il ne reste pas moins un réalisateur honnête cherchant à raconter une histoire simple. C’est plutôt au niveau du travail visuel et plastique qu’il se démarque du lot. A l’inverse de beaucoup de dessins animés actuels (où les procédés numériques sensationnels sont utilisés de manière abusive), Bluth fait une application intelligente de la technique. Celle-ci est en effet mise au service de la narration de Titan ; elle renforce par conséquent le potentiel artistique du film. La preuve la plus flagrante réside dans l’animation des Drej, créatures en images de synthèse et aux déplacements très saccadés. Cette mise en mouvement, qui laisse tout d’abord penser à un manque de fluidité, crée un décalage frappant et apporte un charisme énigmatique à ces personnages. Notons au passage que les incrustations virtuelles entrent ici en parfaite symbiose avec les éléments 2D. En témoignent les magnifiques séquences de poursuites spatiales prenant place dans des univers futuristes éblouissants.
Malgré ces quelques défauts, liés à une évidente envie de toucher un large public, Titan reste donc un excellent film de divertissement, ainsi qu’un véritable petit bijou visuel. De plus, ce revirement artistique annonce un retour de Don Bluth là où l’on ne l’attendait plus… Ce qui nous permet d’espérer pour ses futurs travaux des productions aussi abouties que celle-ci.