Il ne faut généralement pas s’attarder à la lecture des hommages car ils cousinent souvent avec la nostalgie. Ils donnent le cafard. Le Vent des routes, titre du recueil d’hommages posthumes rendus au récemment disparu Nicolas Bouvier, a le mérite de la légèreté. Nicolas Bouvier semblait la rechercher dans chacun de ses textes, peut-être pour conjurer la lourdeur des nostalgies et des clichés du voyage. Chez lui, il n’y a guère de nostalgie que pour les femmes, celles qui le quittent parce qu’il est un homme libre. Quant aux clichés, ils sont tout bonnement absents, peut-être parce que le voyageur, l’iconographe, l’homme vivant précèdent en tous points l’écrivain. On demanda un jour à Bouvier pourquoi pendant dix ans il avait gardé le silence. Il répondit simplement que tout ce temps là il avait été heureux. Le Vent des routes rend justice à ce Bouvier-là, homme heureux plongé dans le monde avant d’être écrivain.
David Boratav